AccueilIndex Articles Questions vives Livres Réseaugraphie Collaborer Guide Écrivez-nous
Notre Francophonie
Acteurs
Culture et éducation
Économie et écologie
Géographie
Grandes questions
Langue
Politique internationale
Sciences et techniques
Société

La Lettre de L'Agora
Abonnez-vous gratuitement à notre bulletin électronique.
>>>
Questions vives
Enseignement à distance
En enseignement à distance, malgré la richesse de la toile, on fait face en Afrique à un manque de contenus adaptés aux besoins locaux.

Document associé
De l'OUA à l'UA : une page de l'histoire de l'Afrique est tournée
Dossier: Afrique

Maurizio Carbone
Membre du centre de l’Union européenne à l’Université de Pittsburgh (au moment de la publication initiale de cet article).
Présentation
«Le 9 juillet, 43 dirigeants africains se sont réunis à Durban, en Afrique du Sud, pour dissoudre l’Organisation de l’unité africaine (OUA) à laquelle succède l’Union africaine (UA). Alors que l’objectif de l’Organisation de l’unité africaine était de lutter contre le colonialisme et l’apartheid, l’Union africaine aura pour mission d’unifier ses 53 Etats membres du point de vue politique, social et économique et d’attirer des aides et investissements étrangers en promouvant démocratie, droits de l’homme et bonne gouvernance.»

Texte
Lorsqu’en 1963 quelques dirigeants africains se sont réunis à Addis-Abeba en vue de fonder l’Organisation de l’unité africaine, ils étaient persuadés que, pour libérer le continent du colonialisme et du racisme, ils devaient s’unir. Pendant longtemps, l’OUA a oeuvré pour encourager la solidarité entre les Etats ayant gagné depuis peu leur indépendance et défendre l’idée de frontières souveraines.
Toutefois, accablée par les dettes et la bureaucratie et en raison de sa politique de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats souverains, l’OUA n’est pas parvenue à empêcher les conflits, arrêter les génocides ou destituer les dictateurs.

Lorsque quarante-trois dirigeants se sont réunis à Durban en juillet 2002, ils ont pris conscience que l’Union africaine ne devait pas devenir « un nouveau bouledogue sans crocs comme son prédécesseur ». Dans son discours d’ouverture, le président de l’Afrique du Sud, M. Thabo Mbeki, nommé premier président de l’Union africaine, a déclaré que les peuples devaient approfondir leur culture de l’action collective et mettre en place de nouveaux niveaux de partenariat. Il a également souligné que la démocratie, la bonne gouvernance et le respect des droits de l’homme étaient des conditions préalables indispensables au développement.

Les économies africaines ont besoin d’être revigorées pour relever les défis de l’économie mondiale. L’Afrique ne peut plus se contenter d’exporter des matières premières, mais doit produire des biens de haute qualité, tout d’abord pour son propre usage et ensuite pour l’exportation. Par conséquent, les Etats membres doivent multiplier les échanges réciproques. L’intégration régionale peut y contribuer, cependant jusqu’à présent la SADC, le COMESA, la CEDEAO, la communauté maghrébine et la communauté de l’Afrique orientale n’ont pas encore engendré de bienfaits importants. Par ailleurs, les capitaux privés fuient trop souvent vers des marchés plus sûrs en Europe et aux Etats-Unis, privant ainsi l’Afrique des ressources nécessaires pour espérer une intégration économique.

Avec ou sans conditions ?

A court terme, l’Afrique a besoin d’aides et d’investissements étrangers. L’un des principaux sujets de discussion à Durban a été le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) (1). Au cours des dernières années, les présidents de l’Afrique du Sud, du Sénégal et du Nigeria ont insisté sur le fait que la souveraineté ne pouvait plus servir d’alibi pour dissimuler une mauvaise conduite. Par la suite, ils se sont rendus à plusieurs reprises en Occident pour défendre l’allègement de la dette, demander un plus large accès des produits africains aux marchés occidentaux et convaincre les pays les plus développés que l’Afrique est suffisamment stable pour attirer davantage d’aides et d’investissements étrangers. Ils se sont engagés à créer un comité de surveillance mutuelle chargé de veiller à ce que les membres respectent les critères de bonne gouvernance et de responsabilité budgétaire. Effectivement, un mois avant la création de l’Union africaine, la mise en place d’un « plan d’action pour l’Afrique » d’un montant de 6 milliards de dollars a été annoncée lors du sommet du G8 au Canada. Pour M. Mbeki et M. Obasanjo, président du Nigeria, le NEPAD était donc censé jouer un rôle essentiel dans la nouvelle Union africaine.

Certains autres dirigeants africains ont déclaré que les Africains devaient s’approprier les programmes concernant l’Afrique et les mettre en oeuvre. Ils estiment que des initiatives telles que le NEPAD pourraient être livrées aux caprices de l’Occident. Le colonel Kadhafi a été le plus éminent porte-parole de ces inquiétudes. En essayant de contrebalancer le rôle de M. Mbeki et M. Obasanjo, le leader libyen a offert une vision différente de l’Union africaine qui, selon lui, pourrait servir de bouclier contre
l’impérialisme occidental. Dans son discours, il a exhorté les dirigeants africains à être fiers d’eux-mêmes et à rejeter les conditions posées à l’octroi de l’aide étrangère. « Nous acceptons l’aide, mais nous refusons les conditions. Nous ne sommes pas des élèves qui ont besoin d’un maître ». Après ses échecs avec la Ligue arabe, le colonel Kadhafi s’est tourné vers le projet d’Union africaine dans l’espoir d’asseoir son influence dans la région. Il a même envisagé de devenir le premier président des Etats-Unis d’Afrique et espéré établir les quartiers de l’Union africaine à Syrte (Libye). C’est dans cette ville qu’au cours de la première semaine de septembre 1999, des dirigeants africains se sont réunis pour une session extraordinaire de l’Organisation de l’unité africaine. La déclaration de Syrte est devenue l’acte constitutif qui régit maintenant l’Union africaine.

Le renouvellement d’un engagement en faveur de la démocratie

Le Sommet de Durban n’était pas axé sur les questions économiques, mais sur la démocratie. Les dirigeants se sont engagés à organiser des élections équitables à intervalles réguliers, à permettre aux partis de l’opposition de faire campagne librement et à créer des commissions électorales indépendantes chargées de suivre les scrutins. Ces mesures témoignent de l’émergence d’une nouvelle génération de dirigeants africains qui sont maintenant conscients de l’importance de la démocratie pour le développement. En effet, 42 des 48 Etats subsahariens ont tenu des élections multipartites au cours des années 1990, contre seulement quatre Etats dans les années 1980. Toutefois, des doutes planent dans le cas de la Libye, du Kenya et du Zimbabwe. M. Kofi Annan a été le seul à condamner dans son discours les manipulations des récentes élections. « Ces derniers temps, le terme démocratie a été trop souvent utilisé à mauvais escient pour décrire des situations où le vote se déroule sans un débat libre et équitable au préalable ». L’engagement en faveur de la démocratie et des droits de l’homme sera vérifié par une unité permanente, chargée de suivre les élections, qui dénoncera toute violation de ces principes.

Le Sommet de Durban a également adopté les règles et statuts procéduraux des organes et institutions de l’Union africaine. Cette union sera constituée de tous les pays africains, à l’exception du Maroc, qui a quitté l’Organisation de l’unité africaine en 1982 lorsqu’elle a reconnu la République arabe sahraouie démocratique.

A l’instar de l’Union européenne, l’Union africaine comprendra une assemblée, une commission, une banque centrale, une cour de justice, un parlement ainsi qu’une monnaie unique. L’assemblée, organe suprême de l’organisation, regroupera l’ensemble des chefs d’Etat et de gouvernement qui composent l’Union. La commission assistera l’assemblée dans le gouvernement de l’Union. Son mandat portera à la fois sur l’intégration politique et économique, mais son pouvoir réel ainsi que le rôle de son président dépendront dans une large mesure des ressources dont elle disposera. Une décision importante a été prise à la dernière minute : il a été décidé que sur les 10 commissaires, cinq seraient des femmes. Cela marque un tournant par rapport aux pratiques passées et présentes : en effet, actuellement aucun des 53 chefs d’Etat n’est une femme. Les femmes étaient complètement absentes de la structure de l’OUA. L’Afrique est ainsi devenue le seul continent au monde à prendre un tel engagement en faveur de l’égalité entre les sexes.

L’argent sera un défi important. La plupart des pays doivent encore régler leurs dettes financières. L'Union africaine hérite en effet de l’OUA plus de 40 millions de dollars de dettes et il n’a pas encore été décidé comment serait résolu ce problème.

Parmi les nouvelles institutions, l’une des plus importantes est le conseil de sécurité et de paix qui comportera 15 membres. Conçu sur le modèle du conseil de sécurité des Nations unies, il sera chargé de la prévention, de la gestion et de la résolution des conflits. Il sera composé de cinq membres semi-permanents (un par région) et de dix membres élus pour deux ans. Contrairement à l’OUA, l’Union africaine aura le droit d’intervenir dans les cas de violations manifestes des droits de l’homme et de crimes contre l’humanité. C’est pour cette raison qu’il a été prévu de former une force de maintien de la paix à partir des armées africaines.

Un avenir plus prometteur ?

Toutefois, il est difficile de savoir si l’Union africaine est le meilleur instrument pour façonner l’avenir de l’Afrique. A la lumière des immenses défis auxquels l’Union africaine est déjà confrontée, il est évident que les changements ne peuvent se faire du jour au lendemain. L’Union africaine succède à une organisation qui était largement critiquée pour son incapacité à servir de médiateur dans les conflits continentaux. L’élément le plus décisif pour l’Union africaine est son habilitation à intervenir dans les affaires internes des Etats membres. Reste maintenant à savoir si l’Union africaine sera à même d’utiliser ses nouveaux pouvoirs ou si les intérêts concurrents de ses dirigeants la paralyseront.
Cependant, malgré un certain scepticisme initial, l’Union africaine ouvre une nouvelle ère pour l’ Afrique, dans laquelle paix, démocratie et bonne gouvernance sont enfin considérées comme les conditions préalables indispensables au développement.

(1) Voir l’article «L’Union européenne et le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD)» par le Dr. Francisco Granell, page 28 de ce numéro. Pour plus d’informations : www.africa-union.org

Source
Article reproduit du Courrier ACP-UE (Commission européenne, Direction générale du Développement), n° 194, septembre-octobre 2002
© Communautés européennes, 1995-2006
«Reproduction autorisée sous réserve d'indication de la source (Le Courrier).»
Recherche
>

Secteur
Politique
Autres documents associéw au dossier Afrique
De l'OUA à l'UA : une page de l'histoire de l'Afrique est tournée
Maurizio Carbone
«Le 9 juillet, 43 dirigeants africains se sont réunis à Durban, en Afrique du Sud, pour dissoudre l’Organisation de l’unité africaine (OUA) à laquelle succède l’Union africaine (UA). Alors que l’objectif de l’Organisation de l’unité africaine était de lutter contre le colonialisme et l’apartheid, l’Union africaine aura pour mission d’unifier ses 53 Etats membres du point de vue politique, social et économique et d’attirer des aides et investissements étrangers en promouvant démocratie, droits de l’homme et bonne » ...
L'attrait des États africains pour la Chine
Jim Fisher-Thompson
Un ancien ambassadeur des États-Unis en Éthiopie, actuellement professeur auxiliaire de l'université George Washington, livre ici quelques-unes de ses réflexions sur les rapports entre l'Afrique et la Chine.
La politique des États-Unis à l'égard de l'Afrique
Jim Fisher-Thompson
Le texte qui suit résume bien les principaux enjeux de la politique africaine de l'administration américaine actuelle.
Les États-Unis et la diffusion de l'enseignement de l'anglais en Afrique
États-Unis, langue anglaise, enseignement des langues, Djibouti, Tchad
Tout semble indiquer que la langue anglaise est en nette en progression sur le continent africain. Dans leurs bagages, les coopérants américains y apportent, en même temps que des médicaments, des manuels scolaires pour l'enseignement de l'anglais. Les deux exemples qui suivent, tirés de documents produits par le gouvernement américain, sont intéressants dans la mesure où ils concernent des pays membres de la Francophonie. De manière fort significative, on y présente l'anglais comme la langue ...