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Un minou robot pour mamie
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Revue Le partenaire
Créée en 1992, la revue le partenaire est devenue au Québec une voix importante pour les personnes utilisatrices de services en santé mentale et pour tous les acteurs concernés par la réadaptation psychosociale, le rétablissement et la problématique de la santé mentale. Ses éditoriaux, ses articles, ses dossiers proposent une information à la fine pointe des connaissances dans le champ de la réadaptation psychosociale. Ils contribuent à enrichir la pratique dans ce domaine et à stimuler le débat entre ses membres.
Destination El Paradiso
El Paradiso n’est pas une maison de retraite comme les autres. Située dans une île enchanteresse qui est réservée à son usage, elle accueille des pensionnaires bien particuliers. Ce sont, par un aspect ou l’autre de leur vie, par ailleurs tout à fait honorable, des originaux, des excentriques, habités par une douce folie, qui n’a sans doute d’égal que la simplicité de leur bonheur. C’est une galerie de personnages un peu fantasques que nous fait rencontrer cet ouvrage tout empreint de tendresse, d’humour et d’humanité. Voici donc les premiers douze membres de ce club très spécial: Perry Bedbrook, Guy Joussemet, Édouard Lachapelle, Andrée Laliberté, Céline Lamontagne, Guy Mercier, Avrum Morrow, Lorraine Palardy, Antoine Poirier, Michel Pouliot, Charles Renaud, Peter Rochester.
Le Guérisseur blessé
Le Guérisseur blessé de Jean Monbourquette est paru au moment où l’humanité entière, devant la catastrophe d’Haïti, s’est sentie blessée et a désiré contribuer de toutes sortes de façons à guérir les victimes de ce grand malheur. Bénéfique coïncidence, occasion pour l’ensemble des soignants du corps et de l’âme de s’alimenter à une source remarquable. Dans ce livre qui fut précédé de plusieurs autres traitant des domaines de la psychologie et du développement personnel , l’auteur pose une question essentielle à tous ceux qui veulent soigner et guérir : « Que se cache-t-il derrière cette motivation intime à vouloir prendre soin d’autrui? Se pourrait-il que la majorité de ceux et celles qui sont naturellement attirés par la formation de soignants espèrent d’abord y trouver des solutions à leurs propres problèmes et guérir leurs propres blessures? » Une question qui ne s’adresse évidemment pas à ceux qui doivent pratiquer une médecine de guerre dans des situations d’urgence!
Mémoire et cerveau
Dans ce numéro de La Recherche, on se limite à étudier la mémoire dans la direction indiquée par le psychologue torontois Endel Tulving, reconnu en en ce moment comme l'un des grands maîtres dans ce domaine. Cela confère au numéro un très haut degré de cohérence qui en facilite la lecture. Culving est à l'origine de la distinction désormais universellement admise entre la « mémoire épisodique » portant sur des événements vécus et la « mémoire sémantique » portant sur des concepts, des connaissances abstraites. C'est la première mémoire que je mets en œuvre quand je m'efforce d'associer des mots à un événement passé, un voyage par exemple; je m'en remets à la seconde quand je m'efforce d'associer des mots automatiquement les uns aux autres, abstraction faite de tout événement vécu auquel ces mots pourraient se rapporter. Au cours de la décennie 1960, Tulving a constaté que les résultats obtenus grâce au premier exercice étaient beaucoup moins bons que ceux obtenus par le second exercice, ce qui l'a incité à faire l'hypothèse qu'il existe deux mémoires distinctes.
Spécial Mémoire
Dans ce numéro de La Recherche, on se limite à étudier la mémoire dans la direction indiquée par le psychologue torontois Endel Tulving, reconnu en en ce moment comme l'un des grands maîtres dans ce domaine. Cela confère au numéro un très haut degré de cohérence qui en facilite la lecture. Culving est à l'origine de la distinction désormais universellement admise entre la « mémoire épisodique » portant sur des événements vécus et la « mémoire sémantique » portant sur des concepts, des connaissances abstraites. C'est la première mémoire que je mets en œuvre quand je m'efforce d'associer des mots à un événement passé, un voyage par exemple; je m'en remets à la seconde quand je m'efforce d'associer des mots automatiquement les uns aux autres, abstraction faite de tout événement vécu auquel ces mots pourraient se rapporter. Au cours de la décennie 1960, Tulving a constaté que les résultats obtenus grâce au premier exercice étaient beaucoup moins bons que ceux obtenus par le second exercice, ce qui l'a incité à faire l'hypothèse qu'il existe deux mémoires distinctes.
L'itinérance au Québec
La personne en situation d’itinérance est celle : […] qui n’a pas d’adresse fixe, de logement stable, sécuritaire et salubre, à très faible revenu, avec une accessibilité discriminatoire à son égard de la part des services, avec des problèmes de santé physique, de santé mentale, de toxicomanie, de violence familiale ou de désorganisation sociale et dépourvue de groupe d’appartenance stable. Cette définition met en évidence la complexité du phénomène et l’importance de l’aspect multifactoriel des éléments déclencheurs tels que la précarité résidentielle et financière, les ruptures sociales, l’accumulation de problèmes divers (santé mentale, santé physique, toxicomanie, etc.). L’itinérance n’est pas un phénomène dont les éléments forment un ensemble rigide et homogène et elle ne se limite pas exclusivement au passage à la rue.L’itinérance est un phénomène dynamique dont les processus d’exclusion, de marginalisation et de désaffiliation en constituent le coeur.
L’habitation comme vecteur de lien social
Evelyne Baillergeau et Paul Morin (2008). L’habitation comme vecteur de lien social, Québec, Collection Problèmes sociaux et intervention, PUQ, 301 p. Quel est le rôle de l’habitation dans la constitution d’un vivre ensemble entre les habitants d’un immeuble, d’un ensemble d’habitations ou même d’un quartier ? Quelles sont les répercussions des conditions de logement sur l’organisation de la vie quotidienne des individus et des familles et sur leurs modes d’inscription dans la société ? En s’intéressant à certaines populations socialement disqualifi ées, soit les personnes ayant des problèmes de santé mentale et les résidents en habitation à loyer modique, les auteurs étudient le logement non seulement comme l’un des déterminants de la santé et du bien-être, mais également comme un lieu d’intervention majeur dans le domaine des services sociaux. De la désinstitutionnalisation à l’intégration, des maisons de chambres aux HLM, ils décrivent et analysent des expériences ayant pour objectif le développement individuel et collectif des habitants et les comparent ensuite à d’autres réalisées au Canada, aux Pays-Bas et en Italie. Pour en savoir plus : http://www.puq.ca
Revue Développement social
On a longtemps sous-estimé l'importance du lien entre les problèmes environnementaux et la vie sociale. Nous savons tous pourtant que lorsque le ciel est assombri par le smog, on hésite à sortir de chez soi pour causer avec un voisin. Pour tous les collaborateurs de ce numéro consacré au développement durable, le côté vert du social et le côté social du vert vont de soi. La vue d'ensemble du Québec qui s'en dégage est enthousiasmante. Les Québécois semblent avoir compris qu'on peut redonner vie à la société en assainissant l'environnement et que les défits à relever pour assurer le développement durable sont des occasions à saisir pour resserrer le tissu social.
La réforme des tutelles: ombres et lumières.
En marge de la nouvelle loi française sur la protection des majeurs, qui doit entrer en vigueur en janvier 2009. La France comptera un million de personnes " protégées " en 2010. Le dispositif actuel de protection juridique n'est plus adapté. Ce " livre blanc " est un plaidoyer pour une mise en œuvre urgente de sa réforme. Les enjeux sont clairs lutter contre les abus, placer la protection de la personne, non plus seulement son patrimoine, au cœur des préoccupations, associer les familles en les informant mieux, protéger tout en respectant la dignité et la liberté individuelle. Le but est pluriel. Tout d'abord, rendre compte des difficultés, des souffrances côtoyées, assumer les ombres, et faire la lumière sur la pratique judiciaire, familiale et sociale ; Ensuite, expliquer le régime juridique de la protection des majeurs, et décrire le fonctionnement, les bienfaits, et les insuffisances ; Enfin, poser les jalons d'une réforme annoncée comme inéluctable et imminente mais systématiquement renvoyée à plus tard. Les auteurs: Michel Bauer, directeur général de l'Udaf du Finistère, l'une des plus grandes associations tutélaires de France, anime des groupes de réflexion sur le sujet et œuvre avec le laboratoire spécialisé de la faculté de droit de Brest. II est l'auteur d'ouvrages sur les tutelles et les curatelles. Thierry Fossier est président de chambre à la cour d'appel de Douai et professeur à l'Université d'Auvergne, où il codirige un master et l'IEJ. II est fondateur de l'Association nationale des juges d'instance, qui regroupe la grande majorité des juges des tutelles. II est l'auteur de nombreuses publications en droit de la famille et en droit des tutelles. Laurence Pécaut-Rivolier, docteur en droit, est magistrate à la Cour de cassation. Juge des tutelles pendant seize ans elle préside l'Association nationale des juges d'instance depuis plusieurs années.
Puzzle, Journal d'une Alzheimer
Ce livre, paru aux Éditions Josette de Lyon en 2004, a fait l'objet d'une émission d'une heure à Radio-France le 21 février 2008. Il est cité dans le préambule du rapport de la COMMISSION NATIONALE CHARGÉE DE L’ÉLABORATION DE PROPOSITIONS POUR UN PLAN NATIONAL CONCERNANT LA MALADIE D’ALZHEIMER ET LES MALADIES APPARENTÉES. Ce rapport fut remis au Président de la République française le 8 novembre 2007. «Je crois savoir où partent mes pensées perdues : elles s’évadent dans mon coeur…. Au fur et à mesure que mon cerveau se vide, mon coeur doit se remplir car j’éprouve des sensations et des sentiments extrêmement forts… Je voudrais pouvoir vivre le présent sans être un fardeau pour les autres et que l’on continue à me traiter avec amour et respect, comme toute personne humaine qui a des émotions et des pensées,même lorsque je semble «ailleurs »1à.
Les inattendus (Stock)
Premier roman d'Eva Kristina Mindszenti, jeune artiste peintre née d’un père hongrois et d’une mère norvégienne, qui vit à Toulouse. Le cadre de l'oeuvre: un hôpital pour enfants, en Hongrie. «Là gisent les "inattendus", des enfants monstrueux, frappés de maladies neurologiques et de malformations héritées de Tchernobyl, que leurs parents ont abandonné. Ils gémissent, bavent, sourient, râlent, mordent parfois. Il y a des visages "toujours en souffrance" comme celui de Ferenc évoquant "le Christ à la descente de la croix". Tout est figé, tout semble mort. Pourtant, la vie palpite et la beauté s’est cachée aussi au tréfonds de ces corps suppliciés. » (Christian Authier, Eva Kristina Mindszenti : une voix inattendue, «L'Opinion indépendante», n° 2754, 12 janvier 2007)
En toute sécurité
Cet ouvrage est l'adaptation québécoise de Safe and secure, publié par les fondateurs du réseau PLAN (Planned Lifetime Advocacy Network) et diffusé au Québec par un groupe affilié à PLAN, Réseaux pour l'avenir. Il s'agit d'un guide pratique dont le but est d'aider à les familles à planifier l'avenir "en toute sécurité" des membres de leur famille aux prises avec un handicap.
"Il faut rester dans la parade ! " - Comment vieillir sans devenir vieux
Auteur : Catherine Bergman. Éditeur : Flammarion Québec, 2005. "Dominique Michel, Jacques Languirand, Jean Béliveau, Antonine Maillet, Jean Coutu, Gilles Vigneault, Hubert Reeves, ils sont une trentaine de personnalités qui, ayant dépassé l’âge de la retraite, sont restés actives et passionnées. Ils n’ont pas la prétention de donner des conseils ni de s’ériger en modèles, mais leur parcours exceptionnel donne à leur parole une valeur inestimable. Journaliste d’expérience, Catherine Bergman les interroge sur le plaisir qu’ils trouvent dans ce qu’ils font, leur militantisme et leur vision de la société ; sur leur corps, ses douleurs et la façon dont ils en prennent soin ; sur leur rapport aux autres générations, ce qu’ils ont encore à apprendre et l’héritage qu’ils souhaitent transmettre ; sur leur perception du temps et leur peur de la mort. Son livre est un petit bijou, une réflexion inspirante sur la vieillesse et l’art d’être vivant." (présentation de l'éditeur).
Le temps des rites. Handicaps et handicapés
Auteur : Jean-François Gomez. Édition : Presses de l'Université Laval, 2005, 192 p. "Il est temps aujourd’hui de modifier profondément notre regard sur les personnes handicapées et sur les « exclus » de toute catégorie, qu’ils soient ou non dans les institutions. Pour l’auteur du Temps des rites, l’occultation du symbolique, ou son déplacement en une société de « signes » qui perd peu à peu toutes formes de socialités repérable et transmissible produit des dégâts incalculables, que les travailleurs sociaux, plus que quiconque doivent intégrer dans leur réflexion. Il faudrait s’intéresser aux rituels et aux « rites de passage » qui accompagnaient jusque là les parcours de toute vie humaine, débusquer l’existence d’une culture qui s’exprime et s’insinue dans toutes les étapes de vie. On découvrira avec étonnement que ces modèles anciens qui ont de plus en plus de la peine à se frayer une voie dans les méandres d’une société technicienne sont d’une terrible efficacité."
Dépendances et protection (2006)
Textes des conférences du colloque tenu le 27 janvier 2006 à l'Île Charron. Formation permanente du Barreau du Québec. Volume 238. 2006
Document associé
Le risque, facteur d'autonomie
Dossier : Autonomie
Dernière modification :
12 / 08 / 2010
Jacques Dufresne

Ivan Illich, auteur de La Némésis médicale, de La perte des sens,
le penseur de l'autonomie. On observe sur sa joue droite
une tumeur qui fut son amie pendant plus de trente ans.

Extrait
Au besoin de sécurité correspond un droit à la sécurité reconnu par toutes les chartes et souvent invoqué sur la place publique. Au besoin de risque ne correspond aucun droit. Sans doute le législateur a-t-il tenu pour acquis que le risque n'existe que trop dans la vie des humains. Il en est résulté un climat tel qu'il est bien rare que l'on plaigne une personne parce qu'elle est privée de risque.
Et pourtant une telle carence existe.

Présentation
Une réhabilitation du risque comme besoin essentiel de l'être humain s'impose, sans quoi l'invitation à l'autonomie restera lettre morte.

Texte
Personnes handicapées, personnes âgées

L'une des principales caractéristiques du SMAF (système de mesure de l'autonomie fonctionnelle) c'est de s'appliquer aussi bien aux personnes handicapées qu'aux personnes âgées. En associant ces deux catégories de personnes, les promoteurs québécois de ce système de mesure de l'autonomie fonctionnelle s'exposaient au reproche d'indisposer les personnes âgées, réfractaires avec raison, à tout ce qui incite à considérer la vieillesse comme une maladie. Leur initiative nous paraît malgré cela justifiée pour au moins une raison: dans la reconquête de leur autonomie perdue, suite à un traumatisme par exemple, les personnes handicapées font souvent preuve d'une détermination et d'un courage qui pourraient servir d'exemple aussi bien aux personnes âgées qu'aux aidants naturels ou professionnels qui les entourent. On pourra en juger à la lumière de l'histoire d'un ami paraplégique que je raconte dans ses grandes lignes.

À dix-neuf ans, il est victime d'un grave accident de ski dont les conséquences immédiates furent tragiques: tétraplégie, institutionnalisation, extrême médicalisation, état dépressif, tendances suicidaires. S.H. continua de glisser sur cette pente fatale jusqu'à ce qu'un élan affectueux d'une nièce le ramène à la vie, un défi qui allait exiger de lui une discipline, un ascétisme digne des stoïciens les plus austères. Bel exemple de ce qui est possible à un être humain dès lors qu'il table sur ce qu'il peut encore faire plutôt que de se résigner à ce qu'il ne peut plus faire: marcher, utiliser ses jambes, manger à un rythme normal, etc. Quand cet ami séjourne dans notre maison, nous répondons à ses besoins. Il est entendu qu'il accomplit seul l'opération du lever. Dans son cas, il s'agit plutôt d'une opération glissement, centimètre par centimètre du lit vers son fauteuil roulant. Cette opération est un sport extrême, une oscillation au-dessus du vide sans filet de sécurité. Il arrive (rarement, je suis en alerte) que S.H. reste coincé entre le lit et le fauteuil. Quand cela se produit, il fait appel à moi. Il est alors 6 h. du matin environ. Je me lève, quitte à me recoucher après. S.H est au travail depuis une heure et il mettra au moins une autre heure, parfois deux pour terminer sa toilette. Et le plaisir à table ne le récompensera qu'à moitié de sa lente et pénible entrée dans le jour: il doit suivre en effet une diète stricte s'il veut éviter que son système digestif ne le tyrannise.

C'est ainsi qu'en transformant la moindre de ses capacités en un tremplin vers une plus grande autonomie, S.H., centimètre par centimètre, a pu franchir l'espace qui le séparait de la vie normale. Il fut bientôt en mesure de conduire une voiture et par la suite sa carrière n'eut rien à envier à celle de l'entrepreneur le plus audacieux.

Rien à envier, certes, mais à quel prix, à quels risques? S.H. m'a raconté que n'eût été des antibiotiques il serait probablement mort d'une infection des voies urinaires après deux ou trois ans de circulation dans un fauteuil roulant. C'était jadis le sort de mes homologues, m'a-t-il aussi confié. Dans une situation comme la sienne, les risques de crises de rétention urinaire sont très élevés. J'ai été témoin d'une de ces crises. S.H. était en voyage. Je l'ai rejoint à une gare, comme prévu, pour apprendre de sa compagne qu'il était souffrant et qu'il fallait que nous nous rendions ensemble à la salle d'urgence la plus proche. L'urgence n'était toutefois pas son premier choix: un lit, un lit où il pourrait s'étendre et faire certains exercices était tout ce dont il avait besoin. À défaut de pouvoir trouver un tel lit à la gare ou chez des amis du voisinage, il se résigna à frapper à la porte de l'urgence. Une fois admis dans ce saint des saints, après de pénibles péripéties, il expliqua au médecin que le remède habituel à un mal comme le sien, la sonde, comportait de trop grands risques dans son cas. Il s'ensuivit deux longues heures de patientes et savantes contorsions sur le lit jusqu'au moment où la vessie commence à se vider d'elle-même. Et la souffrance? Au pire de la crise, S.H. n'a pas même accepté l'innocent comprimé de Tylenol que je lui proposais. Pourquoi? Il a répondu à ma question à ce sujet par un aimable sourire... On peut présumer qu'il tient à tout prix à éviter de retomber dans la dépendance à l'égard des médicaments.

Un observateur qui connaît aussi bien le monde des personnes âgées que celui des personnes handicapées m'apprendrait peut-être que, dans des situations comparables, la volonté d'autonomie est aussi forte dans un cas que dans l'autre. Mon expérience, limitée il est vrai, m'incite plutôt à faire l'hypothèse que la volonté d'autonomie, qui a si bien franchi la barrière de l'institution pour ce qui est des jeunes personnes handicapées, n'a pas encore franchi la barrière de l'âge.

Si l'on avait évalué l'autonomie de mon ami à l'aide du SMAF avant qu'il ne se reprenne en mains, son score aurait sans doute été très bas et pratiquement personne n'aurait pu imaginer qu'un jour il ferait des voyages transcontinentaux en avion et vivrait à l'aise dans les hôtels avec un minimum de soins spéciaux. S.H a conservé un usage partiel de ses mains et de ses bras. Je connais d'autres personnes handicapées n'ayant que leur souffle pour tout organe moteur. Certains d'entre eux participent à des courses de voiliers. Combien de personnes âgées plus autonomes qu'eux oseraient seulement monter dans une chaloupe confortable? C'est sans doute pour réveiller l'autonomie de ses concitoyens âgés que George Bush père fait du parachutisme à plus de quatre-vingts ans. Il existe d'autres moyens moins extrêmes de la conserver!

L'autonomie et le besoin de risque

La complaisance dans la dépendance semble être un mal incurable parmi les personnes âgées des pays riches. Pourquoi? Nous allons examiner un élément de réponse: parce que le risque tarde à rentrer dans les mœurs sous sa forme positive, à être reconnu en tant que besoin fondamental de l'être humain. Le mot risque n'apparaît guère dans le langage de la santé qu'avec une connotation négative dans des expressions comme facteurs de risque ou situation à risque. Comment dans un tel contexte faire une juste place à l'idée que le risque est un facteur de vie? On comprend ainsi pourquoi, alors même que l'autonomie est présentée comme un idéal, ce soit la dépendance qui s'installe. L'autonomie est une excellente chose, tout le monde en convient. Encore faut-il admettre, et on est moins nombreux à en convenir, qu'il faut assumer les risques qu'elle comporte. Car elle comporte toujours des risques. Si bien qu'on peut assimiler le besoin d'autonomie au besoin de risque, idée que Simone Weil a exposée d'une autre manière, en présentant le risque comme un besoin essentiel.

«Le risque est un besoin essentiel de l'âme. L'absence de risque suscite une espèce d'ennui qui paralyse autrement que la peur, mais presque autant. D'ailleurs il y a des situations qui, impliquant une angoisse diffuse sans risques précis, communiquent les deux maladies à la fois.

Le risque est un danger qui provoque une réaction réfléchie ; c'est-à-dire qu'il ne dépasse pas les ressources de l'âme au point de l'écraser sous la peur. Dans certains cas, il enferme une part de jeu ; dans d'autres cas, quand une obligation précise pousse l'homme à y faire face, il constitue le plus haut stimulant possible.


La protection des hommes contre la peur et la terreur n'implique pas la suppression du risque ; elle implique au contraire la présence permanente d'une certaine quantité de risque dans tous les aspects de la vie sociale ; car l'absence de risque affaiblit le courage au point de laisser l'âme, le cas échéant, sans la moindre protection intérieure contre la peur. Il faut seulement que le risque se présente dans des conditions telles qu'il ne se transforme pas en sentiment de fatalité.»


Cette réflexion sur le risque est tirée de l'Enracinement, une œuvre que Simone Weil a écrite à Londres, alors qu'elle dépérissait sous l'effet d'une longue maladie, précédée d'insupportables migraines. Elle devait mourir quelques mois plus tard d'une mort solitaire donnant à entendre qu'elle avait poussé le risque à son extrême limite dans sa volonté de ne consommer que la diète imposée aux pauvres par la guerre. .

Aux yeux de Simone Weil, les besoins humains forment des couples de contraires qu'il est impossible de penser séparément. Le besoin de risque et le besoin de sécurité forment l'un de ces couples de contraires. Quiconque accorde trop d'importance au risque dans sa vie s'expose à un manque sécurité.

Au besoin de sécurité correspond un droit à la sécurité reconnu par toutes les chartes et souvent invoqué sur la place publique. Au besoin de risque ne correspond aucun droit. Sans doute le législateur a-t-il tenu pour acquis que le risque n'existe que trop dans la vie des humains. Il en est résulté un climat tel qu'il est bien rare que l'on plaigne une personne parce qu'elle est privée de risque.

Et pourtant une telle carence existe. Elle frappe à des degrés divers toutes les personnes médicalisées à l'excès. C'est celle dont souffrait S.H. avant sa reconquête. (Notons ici que la critique de la médicalisation que nous faisons n'est pas une critique de la médecine en général. S.H doit sa vie à la médecine post traumatique. Il est le premier à le reconnaître. Il doit toutefois son autonomie, qui est l'achèvement de sa guérison, à son esprit critique à l'endroit de la prise en charge longue durée par la médecine.) C'est à l'acceptation inconditionnelle du risque, omniprésent dans sa vie, et grâce aussi au soutien indéfectible de sa compagne de vie que S.H. doit aujourd'hui son bonheur.

Comment expliquer que la plupart des gens se précipitent vers cette médicalisation à laquelle S.H a voulu si ardemment échapper? S'il est vrai qu'il faut prendre des risques sur le plan financier pour s'enrichir, le risque n'enrichit personne sur tous les autres plans. Si l'on veut faire tourner une économie moderne, il faut au contraire cultiver la peur, faire en sorte que le besoin de sécurité s'exacerbe. Dans ces conditions, la prospérité des compagnies d'assurances et des compagnies pharmaceutiques est assurée. Et dans l'âme humaine dépossédée d'elle-même, le goût naturel du risque est remplacé par des risques artificiels proliférant en elle et autour d'elle au point de la paralyser.

La peur du cancer de la prostate chez les hommes et celle du cancer du sein chez la femme sont de bons exemples de risques artificiels. D'abord parce que l'efficacité du dépistage en vue duquel on cultive la peur est pour le moins douteuse et ensuite parce que, dans le cas du cancer de prostate tout au moins, rien ne prouve, sauf cas exceptionnels, que l'intervention, une fois le diagnostic confirmé, est préférable au laisser-vivre. Autre exemple de risque artificiel: la peur des pandémies savamment et efficacement entretenue, à l'échelle planétaire ... au profit de l'industrie pharmaceutique.

Quand elle est ainsi entretenue, sans relâche, la peur d'une maladie lointaine se transforme inévitablement en une peur prochaine de vivre, une peur telle que l'exercice des fonctions vitales est traversé de doutes qui en chassent le plaisir, signe de vie par excellence:

Adieu douces voluptés
Sans qui le vivre et le mourir nous deviendraient égaux.

L'adieu est de nous, la suite de La Fontaine. Et l'indifférence, mal du nouveau siècle et grande ennemie de l'autonomie, en est la conséquence. La vitesse qui gagne à son tour une à une les activités vitales s'explique sans doute aussi par la peur. Un homme qui court est un homme qui fuit ou qui attaque. Dans l'un ou l'autre cas, il a peur.

Que pouvons-nous opposer à cette culture de la peur, sinon l'idéal d'autonomie? Au cours de la décennie 1970, Ivan Illich a lancé un mouvement en ce sens, dont on a pu croire un moment qu'il freinerait la médicalisation. C'était une illusion, une illusion qui fut toutefois féconde et qui le demeure. Notre ami S.H par exemple a trouvé une partie de son inspiration dans le mouvement d'idées lancé par Illich.
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