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| Revue Le partenaire | | Créée en 1992, la revue le partenaire est devenue au Québec une voix importante pour les personnes utilisatrices de services en santé mentale et pour tous les acteurs concernés par la réadaptation psychosociale, le rétablissement et la problématique de la santé mentale. Ses éditoriaux, ses articles, ses dossiers proposent une information à la fine pointe des connaissances dans le champ de la réadaptation psychosociale. Ils contribuent à enrichir la pratique dans ce domaine et à stimuler le débat entre ses membres. | |
Destination El Paradiso | | El Paradiso n’est pas une maison de retraite comme les autres. Située dans une île enchanteresse qui est réservée à son usage, elle accueille des pensionnaires bien particuliers. Ce sont, par un aspect ou l’autre de leur vie, par ailleurs tout à fait honorable, des originaux, des excentriques, habités par une douce folie, qui n’a sans doute d’égal que la simplicité de leur bonheur. C’est une galerie de personnages un peu fantasques que nous fait rencontrer cet ouvrage tout empreint de tendresse, d’humour et d’humanité. Voici donc les premiers douze membres de ce club très spécial:
Perry Bedbrook, Guy Joussemet, Édouard Lachapelle, Andrée Laliberté,
Céline Lamontagne, Guy Mercier, Avrum Morrow, Lorraine Palardy,
Antoine Poirier, Michel Pouliot, Charles Renaud, Peter Rochester.
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Le Guérisseur blessé | | Le Guérisseur blessé de Jean Monbourquette est paru au moment où l’humanité entière, devant la catastrophe d’Haïti, s’est sentie blessée et a désiré contribuer de toutes sortes de façons à guérir les victimes de ce grand malheur. Bénéfique coïncidence, occasion pour l’ensemble des soignants du corps et de l’âme de s’alimenter à une source remarquable.
Dans ce livre qui fut précédé de plusieurs autres traitant des domaines de la psychologie et du développement personnel , l’auteur pose une question essentielle à tous ceux qui veulent soigner et guérir : « Que se cache-t-il derrière cette motivation intime à vouloir prendre soin d’autrui? Se pourrait-il que la majorité de ceux et celles qui sont naturellement attirés par la formation de soignants espèrent d’abord y trouver des solutions à leurs propres problèmes et guérir leurs propres blessures? » Une question qui ne s’adresse évidemment pas à ceux qui doivent pratiquer une médecine de guerre dans des situations d’urgence! | |
Mémoire et cerveau | | Dans ce numéro de La Recherche, on se limite à étudier la mémoire dans la direction indiquée par le psychologue torontois Endel Tulving, reconnu en en ce moment comme l'un des grands maîtres dans ce domaine. Cela confère au numéro un très haut degré de cohérence qui en facilite la lecture. Culving est à l'origine de la distinction désormais universellement admise entre la « mémoire épisodique » portant sur des événements vécus et la « mémoire sémantique » portant sur des concepts, des connaissances abstraites. C'est la première mémoire que je mets en œuvre quand je m'efforce d'associer des mots à un événement passé, un voyage par exemple; je m'en remets à la seconde quand je m'efforce d'associer des mots automatiquement les uns aux autres, abstraction faite de tout événement vécu auquel ces mots pourraient se rapporter. Au cours de la décennie 1960, Tulving a constaté que les résultats obtenus grâce au premier exercice étaient beaucoup moins bons que ceux obtenus par le second exercice, ce qui l'a incité à faire l'hypothèse qu'il existe deux mémoires distinctes. | |
Spécial Mémoire | | Dans ce numéro de La Recherche, on se limite à étudier la mémoire dans la direction indiquée par le psychologue torontois Endel Tulving, reconnu en en ce moment comme l'un des grands maîtres dans ce domaine. Cela confère au numéro un très haut degré de cohérence qui en facilite la lecture. Culving est à l'origine de la distinction désormais universellement admise entre la « mémoire épisodique » portant sur des événements vécus et la « mémoire sémantique » portant sur des concepts, des connaissances abstraites. C'est la première mémoire que je mets en œuvre quand je m'efforce d'associer des mots à un événement passé, un voyage par exemple; je m'en remets à la seconde quand je m'efforce d'associer des mots automatiquement les uns aux autres, abstraction faite de tout événement vécu auquel ces mots pourraient se rapporter. Au cours de la décennie 1960, Tulving a constaté que les résultats obtenus grâce au premier exercice étaient beaucoup moins bons que ceux obtenus par le second exercice, ce qui l'a incité à faire l'hypothèse qu'il existe deux mémoires distinctes.
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L'itinérance au Québec | | La personne en situation d’itinérance est celle :
[…] qui n’a pas d’adresse fixe, de logement stable, sécuritaire et salubre, à très faible revenu, avec une accessibilité discriminatoire à son égard de la part des services, avec des problèmes de santé physique, de santé mentale, de toxicomanie, de violence familiale ou de désorganisation sociale et
dépourvue de groupe d’appartenance stable.
Cette définition met en évidence la complexité du phénomène et l’importance de l’aspect multifactoriel des éléments déclencheurs tels que la précarité résidentielle et financière, les ruptures sociales, l’accumulation de problèmes divers (santé mentale, santé physique, toxicomanie, etc.). L’itinérance n’est pas un phénomène dont les éléments forment un ensemble rigide et homogène et elle ne se limite pas exclusivement au passage à la rue.L’itinérance est un phénomène dynamique dont les processus d’exclusion, de marginalisation et de désaffiliation
en constituent le coeur. | |
L’habitation comme vecteur de lien social | | Evelyne Baillergeau et Paul Morin (2008). L’habitation comme vecteur de lien social, Québec, Collection
Problèmes sociaux et intervention, PUQ, 301 p.
Quel est le rôle de l’habitation dans la constitution d’un vivre ensemble entre les habitants d’un immeuble, d’un ensemble d’habitations ou même d’un quartier ? Quelles sont les répercussions des conditions de logement sur l’organisation de la vie quotidienne des individus et des familles et sur leurs modes d’inscription dans la société ? En s’intéressant à certaines populations socialement disqualifi ées, soit les personnes ayant des problèmes de santé mentale et les résidents en habitation à loyer modique, les auteurs étudient le logement non seulement comme l’un des déterminants de la santé et du bien-être, mais également comme un lieu d’intervention majeur dans le domaine des services sociaux. De la désinstitutionnalisation à l’intégration, des maisons de chambres aux HLM, ils décrivent et analysent des expériences ayant pour objectif le développement
individuel et collectif des habitants et les comparent ensuite à d’autres réalisées au Canada, aux Pays-Bas et en Italie.
Pour en savoir plus : http://www.puq.ca | |
Revue Développement social | | On a longtemps sous-estimé l'importance du lien entre les problèmes environnementaux et la vie sociale. Nous savons tous pourtant que lorsque le ciel est assombri par le smog, on hésite à sortir de chez soi pour causer avec un voisin. Pour tous les collaborateurs de ce numéro consacré au développement durable, le côté vert du social et le côté social du vert vont de soi. La vue d'ensemble du Québec qui s'en dégage est enthousiasmante. Les Québécois semblent avoir compris qu'on peut redonner vie à la société en assainissant l'environnement et que les défits à relever pour assurer le développement durable sont des occasions à saisir pour resserrer le tissu social.
| La réforme des tutelles: ombres et lumières. | | En marge de la nouvelle loi française sur la protection des majeurs, qui doit entrer en vigueur en janvier 2009.
La France comptera un million de personnes " protégées " en 2010. Le dispositif actuel de protection juridique n'est plus adapté. Ce " livre blanc " est un plaidoyer pour une mise en œuvre urgente de sa réforme. Les enjeux sont clairs lutter contre les abus, placer la protection de la personne, non plus seulement son patrimoine, au cœur des préoccupations, associer les familles en les informant mieux, protéger tout en respectant la dignité et la liberté individuelle. Le but est pluriel. Tout d'abord, rendre compte des difficultés, des souffrances côtoyées, assumer les ombres, et faire la lumière sur la pratique judiciaire, familiale et sociale ; Ensuite, expliquer le régime juridique de la protection des majeurs, et décrire le fonctionnement, les bienfaits, et les insuffisances ; Enfin, poser les jalons d'une réforme annoncée comme inéluctable et imminente mais systématiquement renvoyée à plus tard.
Les auteurs: Michel Bauer, directeur général de l'Udaf du Finistère, l'une des plus grandes associations tutélaires de France, anime des groupes de réflexion sur le sujet et œuvre avec le laboratoire spécialisé de la faculté de droit de Brest. II est l'auteur d'ouvrages sur les tutelles et les curatelles. Thierry Fossier est président de chambre à la cour d'appel de Douai et professeur à l'Université d'Auvergne, où il codirige un master et l'IEJ. II est fondateur de l'Association nationale des juges d'instance, qui regroupe la grande majorité des juges des tutelles. II est l'auteur de nombreuses publications en droit de la famille et en droit des tutelles. Laurence Pécaut-Rivolier, docteur en droit, est magistrate à la Cour de cassation. Juge des tutelles pendant seize ans elle préside l'Association nationale des juges d'instance depuis plusieurs années. | |
Puzzle, Journal d'une Alzheimer | | Ce livre, paru aux Éditions Josette de Lyon en 2004, a fait l'objet d'une émission d'une heure à Radio-France le 21 février 2008. Il est cité dans le préambule du rapport de la COMMISSION NATIONALE CHARGÉE DE L’ÉLABORATION DE PROPOSITIONS POUR UN PLAN NATIONAL CONCERNANT
LA MALADIE D’ALZHEIMER ET LES MALADIES APPARENTÉES. Ce rapport fut remis au Président de la République française le 8 novembre 2007.
«Je crois savoir où partent mes pensées perdues : elles s’évadent dans mon coeur…. Au fur et à mesure que mon cerveau se vide, mon coeur doit se remplir car j’éprouve des sensations et des sentiments extrêmement forts… Je voudrais pouvoir vivre le présent sans être un fardeau pour les autres et que l’on continue à me traiter avec amour et respect, comme toute personne humaine qui a des émotions et des pensées,même lorsque je semble «ailleurs »1à.
| Les inattendus (Stock) | | Premier roman d'Eva Kristina Mindszenti, jeune artiste peintre née d’un père hongrois et d’une mère norvégienne, qui vit à Toulouse. Le cadre de l'oeuvre: un hôpital pour enfants, en Hongrie. «Là gisent les "inattendus", des enfants monstrueux, frappés de maladies neurologiques et de malformations héritées de Tchernobyl, que leurs parents ont abandonné. Ils gémissent, bavent, sourient, râlent, mordent parfois. Il y a des visages "toujours en souffrance" comme celui de Ferenc évoquant "le Christ à la descente de la croix". Tout est figé, tout semble mort. Pourtant, la vie palpite et la beauté s’est cachée aussi au tréfonds de ces corps suppliciés. » (Christian Authier, Eva Kristina Mindszenti : une voix inattendue, «L'Opinion indépendante», n° 2754, 12 janvier 2007) | |
En toute sécurité | | Cet ouvrage est l'adaptation québécoise de Safe and secure, publié par les fondateurs du réseau PLAN (Planned Lifetime Advocacy Network) et diffusé au Québec par un groupe affilié à PLAN, Réseaux pour l'avenir. Il s'agit d'un guide pratique dont le but est d'aider à les familles à planifier l'avenir "en toute sécurité" des membres de leur famille aux prises avec un handicap. | |
"Il faut rester dans la parade ! " - Comment vieillir sans devenir vieux | | Auteur : Catherine Bergman. Éditeur : Flammarion Québec, 2005. "Dominique Michel, Jacques Languirand, Jean Béliveau, Antonine Maillet, Jean Coutu, Gilles Vigneault, Hubert Reeves, ils sont une trentaine de personnalités qui, ayant dépassé l’âge de la retraite, sont restés actives et passionnées. Ils n’ont pas la prétention de donner des conseils ni de s’ériger en modèles, mais leur parcours exceptionnel donne à leur parole une valeur inestimable. Journaliste d’expérience, Catherine Bergman les interroge sur le plaisir qu’ils trouvent dans ce qu’ils font, leur militantisme et leur vision de la société ; sur leur corps, ses douleurs et la façon dont ils en prennent soin ; sur leur rapport aux autres générations, ce qu’ils ont encore à apprendre et l’héritage qu’ils souhaitent transmettre ; sur leur perception du temps et leur peur de la mort. Son livre est un petit bijou, une réflexion inspirante sur la vieillesse et l’art d’être vivant." (présentation de l'éditeur). | |
Le temps des rites. Handicaps et handicapés | | Auteur : Jean-François Gomez.
Édition : Presses de l'Université Laval, 2005, 192 p.
"Il est temps aujourd’hui de modifier profondément notre regard sur les personnes handicapées et sur les « exclus » de toute catégorie, qu’ils soient ou non dans les institutions. Pour l’auteur du Temps des rites, l’occultation du symbolique, ou son déplacement en une société de « signes » qui perd peu à peu toutes formes de socialités repérable et transmissible produit des dégâts incalculables, que les travailleurs sociaux, plus que quiconque doivent intégrer dans leur réflexion.
Il faudrait s’intéresser aux rituels et aux « rites de passage » qui accompagnaient jusque là les parcours de toute vie humaine, débusquer l’existence d’une culture qui s’exprime et s’insinue dans toutes les étapes de vie. On découvrira avec étonnement que ces modèles anciens qui ont de plus en plus de la peine à se frayer une voie dans les méandres d’une société technicienne sont d’une terrible efficacité." | |
Dépendances et protection (2006) | | Textes des conférences du colloque tenu le 27 janvier 2006 à l'Île Charron. Formation permanente du Barreau du Québec. Volume 238. 2006 | | |
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Mémoire |
Dernière modification : 10 / 20 / 2009 |
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Définition |
N.B. Pour préparer ce dossier, nous nous sommes inspirés des principaux articles de ce numéro spécial de la Recherche. On peut télécharger plusieurs de ces articles sur le site de la revue.
Le numéro de juillet/août 2009 de la revue La Recherche est consacré à la mémoire et à ses liens avec le cerveau. Le cerveau est le sujet de l’heure en recherche, en recherche médicale tout au moins, comme le montrent les résultats de ce survol effectué sur le web. Une recherche sur brain dans le site de la revue Science donne 26 888 résultats, soit presque autant qu'une recherche sur cancer, 27 513. On obtient 20 062 pour une recherche sur heart et 8 040 sur lung. L'ensemble du tableau qu'on peut dresser par cette méthode paresseuse reflète assez bien les grands enjeux: 79 921 pour water, 56 893 pour health, 52 678 pour energy, 38 000 pour population, 37 540 pour earth, 27 513 pour space15 894 pour climate.
La prévalence de la maladie d'Alzheimer et de diverses autres lésions cérébrales explique en partie cet intérêt pour le cerveau, mais en partie seulement. La montée des sciences cognitives et des sciences de la complexité, en parallèle avec l'informatique, (dont elles empruntent le vocabulaire,) y est aussi pour quelque chose. Et le tout se déroule dans un contexte où les tenants de l'approche réductionniste espèrent pouvoir trouver dans les replis du cerveau les arguments ultimes contre l'existence, au coeur de l'être humain, d'un principe spirituel entouré d'un mystère irréductible. Le cerveau est devenu la nouvelle et dernière frontière dans l'exploration de la nature par l'homme et l'autonomie, contestée, de la conscience face à lui, apparaît comme le dernier retranchement des religions et de la philosophie classique.
Dans le numéro de La Recherche, on se tient toutefois prudemment en marge de ce débat. On se limite à étudier la mémoire dans la direction indiquée par le psychologue torontois Endel Tulving, reconnu en en ce moment comme l'un des grands maîtres dans ce domaine. Cela confère au numéro un très haut degré de cohérence qui en facilite la lecture. Culving est à l'origine de la distinction désormais universellement admise entre la « mémoire épisodique » portant sur des événements vécus et la « mémoire sémantique » portant sur des concepts, des connaissances abstraites. C'est la première mémoire que je mets en œuvre quand je m'efforce d'associer des mots à un événement passé, un voyage par exemple; je m'en remets à la seconde quand je m'efforce d'associer des mots automatiquement les uns aux autres, abstraction faite de tout événement vécu auquel ces mots pourraient se rapporter. Au cours de la décennie 1960, Tulving a constaté que les résultats obtenus grâce au premier exercice étaient beaucoup moins bons que ceux obtenus par le second exercice, ce qui l'a incité à faire l'hypothèse qu'il existe deux mémoires distinctes.
Précisons tout de suite que deux mémoires distinctes ne veut pas dire deux zones différentes du cerveau. La chose est bien établie : les souvenirs ne sont pas des enregistrements enfouis dans des endroits déterminés de notre cerveau, telle une fiche dans un classeur. Ils ressemblent plutôt, autre comparaison boiteuse mais plus adéquate, à une page Web dont les éléments, images, texte, vidéos, sont situés sur des serveurs différents et rassemblés par une commande. Un jour, telle image est associée à tel texte et à tel vidéo, le lendemain elle pourra être associée à tel autre texte et à tel autre vidéo. « Notre mémoire est un processus dynamique. Chaque fois que nous évoquons un événement passé de notre vie, nous en reconstruisons le souvenir à partir d'éléments de natures très différentes que nous avons enregistrés.»
La thèse des deux mémoires mettra du temps à s'imposer. Le doute s’est dissipé lorsque des tests ont démontré qu'un patient, victime d'un accident de voiture ayant provoqué une lésion à un endroit déterminé du cerveau, avait conservé une mémoire sémantique intacte tout en ayant perdu complètement la mémoire épisodique. Dans les annales des études sur la mémoire, ce patient est connu sous le nom de K.C. De la mémoire épisodique, Tulving dit que «c'est le seul système de mémoire qui permette de revivre consciemment des expériences antérieures et donc de ''voyager dans le temps''. » « Il n'existe selon moi, ajoute-t-il, que dans l'espèce humaine et il s'accompagne d'un état de conscience particulier que j'ai qualifié de ''d'autonoétique''»
L'identité
Cette conscience autonoétique, n'est-ce pas l'identité? Endel Tulving a effectivement ouvert la voie à de nouvelles recherches sur l'identité. L’article intitulé « Tous les rouages de notre identité », est consacré à cette question. On y apprend qu' «aujourd'hui, on considère que c'est la mémoire autobiographique, celle des expériences et des connaissances personnelles acquises tout au long de la vie, qui fonde notre sentiment d'identité ». Rouages, le mot est bien choisi. Il est bien dans le ton des autres métaphores que les auteurs, Martin Conway et Pascale Piolino, utilisent pour exposer leur thèse centrée sur l'idée d'identité exécutive, traduction française de working self. Notre identité est ainsi présentée comme une chose que nous gérons. Parlant de la mobilisation de la mémoire autobiographique - mobilisation par laquelle l'identité se concrétise - , les auteurs écrivent: «Il s'agit la plupart du temps d'un processus stratégique : une construction contrôlée par un administrateur, une identité exécutive ( working self, en anglais). Autrement dit, en fonction de notre état, de notre identité à un moment donné, nous privilégions l'accès à un souvenir plutôt qu'à un autre. Ainsi, c'est cette identité exécutive qui détermine quels souvenirs vont être rappelés. »
C'est à partir de notre identité à un moment donné que nous construisons nos souvenirs, mais ce sont aussi ces souvenirs qui fondent notre sentiment d'identité. Nous ne nous arrêterons pas à cette pétition de principe, même si elle jette un certain discrédit sur l'ensemble de l'article. Ce sont les métaphores empruntées au management qui retiendront notre attention. Pour nous aider à bien gérer notre identité, les auteurs donnent de précieuses indications. Une longue citation s'impose ici:
« On savait déjà que la mémoire autobiographique reposait sur deux composantes, la mémoire épisodique, c'est-à-dire celle des événements, et la mémoire sémantique, plus conceptuelle, celle des connaissances générales sur le monde et sur soi. Mais ce nouveau modèle a mis l'accent sur le fait que les souvenirs autobiographiques sont des reconstructions mentales complexes. Il stipule que la mémoire autobiographique est guidée par deux principes complémentaires : celui de correspondance et celui de cohérence. Quand on reconstruit un souvenir, il doit refléter au mieux notre expérience de la réalité, c'est le principe de correspondance. Il doit aussi, selon le principe de correspondance, être en accord avec ce que nous sommes, c'est-à-dire tous nos souvenirs, nos croyances et l'idée que nous nous faisons de nous-mêmes.
Dans ce cadre théorique, chaque souvenir est le résultat d'un équilibre entre correspondance et cohérence, qui nourrit notre identité et permet de nous adapter au monde social. Trop de correspondance suscite l'émergence de souvenirs très détaillés et vivaces qui focalisent notre attention, et nos ressources cognitives et affectives. Par exemple, dans les cas extrêmes comme un stress post-traumatique, des détails intrusifs viennent à l'esprit et sont intensément revécus. À l'inverse, trop de cohérence peut conduire à construire un passé fantasque, et donc à une identité non fondée sur les expériences vécues, voire à l'extrême à une fausse identité. Les patients schizophrènes, par exemple, ont à la fois des souvenirs qui confirment leurs délires (principe de cohérence) et des souvenirs qui contredisent leurs croyances (principe de correspondance). Entre ces deux extrêmes, des souvenirs autobiographiques bien équilibrés participent au sentiment de bien-être et nous permettent de nous projeter dans le passé et dans le futur.
L'idée que les souvenirs autobiographiques ne sont donc pas stockés comme tels en mémoire et sont des constructions mentales est désormais de plus en plus partagée. Le processus est complexe et dynamique. Ces souvenirs sont construits à chaque rappel à partir de plusieurs types d'informations gérées par différentes régions cérébrales. C'est de cette construction qu'émerge le sentiment conscient de revivre l'événement passé.»
Il y a là une hypothèse intéressante, tant sur le plan théorique que sur le plan pratique. Dans l'entreprise de construction de nos souvenirs, qui eux-mêmes fondent notre identité, nous avons intérêt à chercher un équilibre entre les souvenirs qui nous ressemblent et ceux qui ressemblent à la réalité. À la réflexion, c'est ce que nous faisons tous spontanément: nous colorons nos histoires de nous-mêmes pour que nos auditeurs nous y retrouvent et nous veillons en même temps à ce qu'elles correspondent à la réalité.
Ce sont là des processus mentaux auxquels les auteurs s'efforcent de faire correspondre des processus cérébraux bien localisés. Ils ont constaté « que non seulement l'existence d'un réseau cérébral commun aux différentes composantes de la mémoire autobiographique a été montrée, mais aussi celle de régions spécifiques, confirmant l'idée d'une dissociation fonctionnelle entre les aspects épisodiques et conceptuels. Le système hippocampique et postérieur (pariéto-occipital) serait toujours impliqué dans l'évocation de souvenirs épisodiques, plus ou moins anciens, alors que le système fronto-temporal latéral semble lié aux processus stratégiques et à l'accès aux connaissances conceptuelles ». Les auteurs nous rappellent ensuite que certaines lésions touchant l'une ou l'autre de ces zones peuvent provoquer une perte de l'identité découlant elle-même d'une paralysie de la mémoire autobiographique. Dans le cas de la maladie d'Alzheimer et de la démence frontale, c'est généralement la mémoire épisodique qui est le plus touchée, la mémoire conceptuelle demeurant relativement bonne.
Conclusion: « Ainsi, l'ensemble de ces travaux, tant en neuropsychologie qu'en neuro-imagerie, plaide fortement en faveur de deux systèmes distincts dans la mémoire autobiographique et l'expérience consciente, qui peuvent être dissociés dans la pathologie mais agissent de concert dans le fonctionnement normal ». Ils soulignent aussi « une certaine continuité entre les capacités de projection dans le temps subjectif, qu'il s'agisse du passé ou bien du futur, ce qui se réfère directement aux propriétés de la conscience autonoétique, pierre angulaire de la mémoire épisodique ».
Dans le même numéro, un article intitulé « Notre passé construit notre futur » nous apprend qu'il existe un système neurocognitif commun aux souvenirs d'événements réels et aux projections, résultats qui, selon l'auteur Liliane Manning, ouvrent une nouvelle perspective: « Notre cerveau construira l'avenir non seulement avec nos souvenirs concrets, mais aussi avec ceux qui prennent forme et réalité uniquement dans notre mémoire. » Autrement dit, je peux organiser mon avenir à partir d'une reconstruction de mon passé plus ou moins fidèle à la réalité. Autre chose que la simple introspection avait apprise aux hommes du passé.
Les effets du vieillissement et la maladie d'Alzheimer sont des sujets incontournables dans un numéro consacré à la mémoire. Dans celui-ci, on se penche surtout sur les tests qui permettent un dépistage précoce de la maladie d'Alzheimer. On peut désormais, au moyen de tests cognitifs, en découvrir les premiers signes plus de dix ans avant que le diagnostic ne s'impose. Ces travaux sont importants parce que les vagues espoirs qu'on peut avoir de guérir la maladie ou de l'atténuer supposent pour le moment qu'on puisse agir tôt. Dans l'article qu'elle consacre à cette question, « Repérer plus tôt Alzheimer », Hélène Amieva écrit: «Que faire des résultats obtenus à l'aide de notre étude ? Il pourrait être tentant de les utiliser pour faire du dépistage douze ans avant la démence. Ce n'est en fait pas réaliste. Les tests qui jaugent le déclin cognitif lors de cette phase ne sont pas assez nombreux, ni sensibles pour prédire la maladie avec un risque d'erreur minimal. En revanche, repérer la maladie cinq ans avant le diagnostic semble être un enjeu à notre portée. Les capacités cognitives affectées sont plus importantes et les tests permettant de les détecter, plus nombreux et puissants. Nous travaillons donc à l'élaboration d'un algorithme de détection de la maladie d'Alzheimer efficace cinq ans avant le diagnostic de démence. »
Chemin faisant, Hélène Amieva prend position sur les liens entre la dépression et la maladie d'Alzheimer. « Certains auteurs soutiennent que la dépression est un facteur de risque de déclin cognitif, alors que, pour d'autres, la dépression serait une conséquence de la prise de conscience du déclin cognitif. Un des résultats de notre étude est justement qu'elle montre que la dépression ne serait pas une cause de la maladie d'Alzheimer, mais qu'elle accompagne le déclin cognitif. » Voilà sans doute pourquoi dans un autre article, « Vieillir sans absences », Anne-Marie Ergis recommande aux personnes âgées de recourir à une sorte de jogging cognitif, plus précisément à des stratégies mnémotechniques d'encodage des souvenirs. Ce sont en effet les techniques d'encodage qui seraient en cause dans le déclin de la mémoire chez les aînés.
« La mémoire est aux ordres du cœur », écrivait Rivarol, rendant compte ainsi d'une expérience commune. L’article sur « La bonne influence des émotions » nous apprend que cette observation a été maintes fois confirmée et donne même des précisions sur les zones du cerveau qui sont mobilisées par les émotions: « Les expériences conduites chez l'homme et l'animal de laboratoire ont mis en évidence le rôle prépondérant de certaines structures cérébrales - amygdales et hippocampes - dans la mémorisation des souvenirs chargés d'émotions et ont souligné également le rôle crucial des neurohormones et des neuromodulateurs, telles la dopamine et la noradrénaline, ces substances qui modulent et ajustent les transferts d'influx nerveux dans les réseaux neuronaux. Que l'amygdale soit impliquée directement ne nous étonne guère : cette structure est le centre nerveux des émotions. »
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Enjeux |
L'intérêt de ces recherches en vue du dépistage et du traitement de la démence est manifeste, mais on peut craindre qu'elles ne soient utilisées à d'autres fins plus douteuses, dont un rapport avec soi-même calqué sur la gestion. La raison instrumentale est déjà à l'oeuvre dans la façon dont les recherches sont menées et dans les métaphores utilisées et l'on voit poindre le jour où, en bon gestionnaire de soi, chacun consommera des drogues permettant d'accroître l'efficacité de tel ou tel type de mémoire. Déjà la question se pose: vivre avec toute la spontanéité et les tâtonnements que cette spontanéité impose ou gérer son existence au moyen de son «identité exécutive», par la «construction contrôlée» de ses souvenirs. |
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