AccueilIndexCréditsContact



La Lettre de L'Agora
Abonnez-vous gratuitement à notre bulletin électronique.
>>>

La méthode Lovaas, une voie de guérison contre l'autisme (Hélène Laberge)
Quelques sites québécois sur l'autisme
L'Autiste Show (Hélène Laberge)
Bibliothèque numérique et sitographie
Sites sur l'autisme et les troubles envahissants du développement (Hélène Laberge)
TEDDI au tribunal (Jacques Dufresne)
Un minou robot pour mamie
Un minou robot pour mamie (Jacques Dufresne)


Revue Le partenaire
Créée en 1992, la revue le partenaire est devenue au Québec une voix importante pour les personnes utilisatrices de services en santé mentale et pour tous les acteurs concernés par la réadaptation psychosociale, le rétablissement et la problématique de la santé mentale. Ses éditoriaux, ses articles, ses dossiers proposent une information à la fine pointe des connaissances dans le champ de la réadaptation psychosociale. Ils contribuent à enrichir la pratique dans ce domaine et à stimuler le débat entre ses membres.
Destination El Paradiso
El Paradiso n’est pas une maison de retraite comme les autres. Située dans une île enchanteresse qui est réservée à son usage, elle accueille des pensionnaires bien particuliers. Ce sont, par un aspect ou l’autre de leur vie, par ailleurs tout à fait honorable, des originaux, des excentriques, habités par une douce folie, qui n’a sans doute d’égal que la simplicité de leur bonheur. C’est une galerie de personnages un peu fantasques que nous fait rencontrer cet ouvrage tout empreint de tendresse, d’humour et d’humanité. Voici donc les premiers douze membres de ce club très spécial: Perry Bedbrook, Guy Joussemet, Édouard Lachapelle, Andrée Laliberté, Céline Lamontagne, Guy Mercier, Avrum Morrow, Lorraine Palardy, Antoine Poirier, Michel Pouliot, Charles Renaud, Peter Rochester.
Le Guérisseur blessé
Le Guérisseur blessé de Jean Monbourquette est paru au moment où l’humanité entière, devant la catastrophe d’Haïti, s’est sentie blessée et a désiré contribuer de toutes sortes de façons à guérir les victimes de ce grand malheur. Bénéfique coïncidence, occasion pour l’ensemble des soignants du corps et de l’âme de s’alimenter à une source remarquable. Dans ce livre qui fut précédé de plusieurs autres traitant des domaines de la psychologie et du développement personnel , l’auteur pose une question essentielle à tous ceux qui veulent soigner et guérir : « Que se cache-t-il derrière cette motivation intime à vouloir prendre soin d’autrui? Se pourrait-il que la majorité de ceux et celles qui sont naturellement attirés par la formation de soignants espèrent d’abord y trouver des solutions à leurs propres problèmes et guérir leurs propres blessures? » Une question qui ne s’adresse évidemment pas à ceux qui doivent pratiquer une médecine de guerre dans des situations d’urgence!
Mémoire et cerveau
Dans ce numéro de La Recherche, on se limite à étudier la mémoire dans la direction indiquée par le psychologue torontois Endel Tulving, reconnu en en ce moment comme l'un des grands maîtres dans ce domaine. Cela confère au numéro un très haut degré de cohérence qui en facilite la lecture. Culving est à l'origine de la distinction désormais universellement admise entre la « mémoire épisodique » portant sur des événements vécus et la « mémoire sémantique » portant sur des concepts, des connaissances abstraites. C'est la première mémoire que je mets en œuvre quand je m'efforce d'associer des mots à un événement passé, un voyage par exemple; je m'en remets à la seconde quand je m'efforce d'associer des mots automatiquement les uns aux autres, abstraction faite de tout événement vécu auquel ces mots pourraient se rapporter. Au cours de la décennie 1960, Tulving a constaté que les résultats obtenus grâce au premier exercice étaient beaucoup moins bons que ceux obtenus par le second exercice, ce qui l'a incité à faire l'hypothèse qu'il existe deux mémoires distinctes.
Spécial Mémoire
Dans ce numéro de La Recherche, on se limite à étudier la mémoire dans la direction indiquée par le psychologue torontois Endel Tulving, reconnu en en ce moment comme l'un des grands maîtres dans ce domaine. Cela confère au numéro un très haut degré de cohérence qui en facilite la lecture. Culving est à l'origine de la distinction désormais universellement admise entre la « mémoire épisodique » portant sur des événements vécus et la « mémoire sémantique » portant sur des concepts, des connaissances abstraites. C'est la première mémoire que je mets en œuvre quand je m'efforce d'associer des mots à un événement passé, un voyage par exemple; je m'en remets à la seconde quand je m'efforce d'associer des mots automatiquement les uns aux autres, abstraction faite de tout événement vécu auquel ces mots pourraient se rapporter. Au cours de la décennie 1960, Tulving a constaté que les résultats obtenus grâce au premier exercice étaient beaucoup moins bons que ceux obtenus par le second exercice, ce qui l'a incité à faire l'hypothèse qu'il existe deux mémoires distinctes.
L'itinérance au Québec
La personne en situation d’itinérance est celle : […] qui n’a pas d’adresse fixe, de logement stable, sécuritaire et salubre, à très faible revenu, avec une accessibilité discriminatoire à son égard de la part des services, avec des problèmes de santé physique, de santé mentale, de toxicomanie, de violence familiale ou de désorganisation sociale et dépourvue de groupe d’appartenance stable. Cette définition met en évidence la complexité du phénomène et l’importance de l’aspect multifactoriel des éléments déclencheurs tels que la précarité résidentielle et financière, les ruptures sociales, l’accumulation de problèmes divers (santé mentale, santé physique, toxicomanie, etc.). L’itinérance n’est pas un phénomène dont les éléments forment un ensemble rigide et homogène et elle ne se limite pas exclusivement au passage à la rue.L’itinérance est un phénomène dynamique dont les processus d’exclusion, de marginalisation et de désaffiliation en constituent le coeur.
L’habitation comme vecteur de lien social
Evelyne Baillergeau et Paul Morin (2008). L’habitation comme vecteur de lien social, Québec, Collection Problèmes sociaux et intervention, PUQ, 301 p. Quel est le rôle de l’habitation dans la constitution d’un vivre ensemble entre les habitants d’un immeuble, d’un ensemble d’habitations ou même d’un quartier ? Quelles sont les répercussions des conditions de logement sur l’organisation de la vie quotidienne des individus et des familles et sur leurs modes d’inscription dans la société ? En s’intéressant à certaines populations socialement disqualifi ées, soit les personnes ayant des problèmes de santé mentale et les résidents en habitation à loyer modique, les auteurs étudient le logement non seulement comme l’un des déterminants de la santé et du bien-être, mais également comme un lieu d’intervention majeur dans le domaine des services sociaux. De la désinstitutionnalisation à l’intégration, des maisons de chambres aux HLM, ils décrivent et analysent des expériences ayant pour objectif le développement individuel et collectif des habitants et les comparent ensuite à d’autres réalisées au Canada, aux Pays-Bas et en Italie. Pour en savoir plus : http://www.puq.ca
Revue Développement social
On a longtemps sous-estimé l'importance du lien entre les problèmes environnementaux et la vie sociale. Nous savons tous pourtant que lorsque le ciel est assombri par le smog, on hésite à sortir de chez soi pour causer avec un voisin. Pour tous les collaborateurs de ce numéro consacré au développement durable, le côté vert du social et le côté social du vert vont de soi. La vue d'ensemble du Québec qui s'en dégage est enthousiasmante. Les Québécois semblent avoir compris qu'on peut redonner vie à la société en assainissant l'environnement et que les défits à relever pour assurer le développement durable sont des occasions à saisir pour resserrer le tissu social.
La réforme des tutelles: ombres et lumières.
En marge de la nouvelle loi française sur la protection des majeurs, qui doit entrer en vigueur en janvier 2009. La France comptera un million de personnes " protégées " en 2010. Le dispositif actuel de protection juridique n'est plus adapté. Ce " livre blanc " est un plaidoyer pour une mise en œuvre urgente de sa réforme. Les enjeux sont clairs lutter contre les abus, placer la protection de la personne, non plus seulement son patrimoine, au cœur des préoccupations, associer les familles en les informant mieux, protéger tout en respectant la dignité et la liberté individuelle. Le but est pluriel. Tout d'abord, rendre compte des difficultés, des souffrances côtoyées, assumer les ombres, et faire la lumière sur la pratique judiciaire, familiale et sociale ; Ensuite, expliquer le régime juridique de la protection des majeurs, et décrire le fonctionnement, les bienfaits, et les insuffisances ; Enfin, poser les jalons d'une réforme annoncée comme inéluctable et imminente mais systématiquement renvoyée à plus tard. Les auteurs: Michel Bauer, directeur général de l'Udaf du Finistère, l'une des plus grandes associations tutélaires de France, anime des groupes de réflexion sur le sujet et œuvre avec le laboratoire spécialisé de la faculté de droit de Brest. II est l'auteur d'ouvrages sur les tutelles et les curatelles. Thierry Fossier est président de chambre à la cour d'appel de Douai et professeur à l'Université d'Auvergne, où il codirige un master et l'IEJ. II est fondateur de l'Association nationale des juges d'instance, qui regroupe la grande majorité des juges des tutelles. II est l'auteur de nombreuses publications en droit de la famille et en droit des tutelles. Laurence Pécaut-Rivolier, docteur en droit, est magistrate à la Cour de cassation. Juge des tutelles pendant seize ans elle préside l'Association nationale des juges d'instance depuis plusieurs années.
Puzzle, Journal d'une Alzheimer
Ce livre, paru aux Éditions Josette de Lyon en 2004, a fait l'objet d'une émission d'une heure à Radio-France le 21 février 2008. Il est cité dans le préambule du rapport de la COMMISSION NATIONALE CHARGÉE DE L’ÉLABORATION DE PROPOSITIONS POUR UN PLAN NATIONAL CONCERNANT LA MALADIE D’ALZHEIMER ET LES MALADIES APPARENTÉES. Ce rapport fut remis au Président de la République française le 8 novembre 2007. «Je crois savoir où partent mes pensées perdues : elles s’évadent dans mon coeur…. Au fur et à mesure que mon cerveau se vide, mon coeur doit se remplir car j’éprouve des sensations et des sentiments extrêmement forts… Je voudrais pouvoir vivre le présent sans être un fardeau pour les autres et que l’on continue à me traiter avec amour et respect, comme toute personne humaine qui a des émotions et des pensées,même lorsque je semble «ailleurs »1à.
Les inattendus (Stock)
Premier roman d'Eva Kristina Mindszenti, jeune artiste peintre née d’un père hongrois et d’une mère norvégienne, qui vit à Toulouse. Le cadre de l'oeuvre: un hôpital pour enfants, en Hongrie. «Là gisent les "inattendus", des enfants monstrueux, frappés de maladies neurologiques et de malformations héritées de Tchernobyl, que leurs parents ont abandonné. Ils gémissent, bavent, sourient, râlent, mordent parfois. Il y a des visages "toujours en souffrance" comme celui de Ferenc évoquant "le Christ à la descente de la croix". Tout est figé, tout semble mort. Pourtant, la vie palpite et la beauté s’est cachée aussi au tréfonds de ces corps suppliciés. » (Christian Authier, Eva Kristina Mindszenti : une voix inattendue, «L'Opinion indépendante», n° 2754, 12 janvier 2007)
En toute sécurité
Cet ouvrage est l'adaptation québécoise de Safe and secure, publié par les fondateurs du réseau PLAN (Planned Lifetime Advocacy Network) et diffusé au Québec par un groupe affilié à PLAN, Réseaux pour l'avenir. Il s'agit d'un guide pratique dont le but est d'aider à les familles à planifier l'avenir "en toute sécurité" des membres de leur famille aux prises avec un handicap.
"Il faut rester dans la parade ! " - Comment vieillir sans devenir vieux
Auteur : Catherine Bergman. Éditeur : Flammarion Québec, 2005. "Dominique Michel, Jacques Languirand, Jean Béliveau, Antonine Maillet, Jean Coutu, Gilles Vigneault, Hubert Reeves, ils sont une trentaine de personnalités qui, ayant dépassé l’âge de la retraite, sont restés actives et passionnées. Ils n’ont pas la prétention de donner des conseils ni de s’ériger en modèles, mais leur parcours exceptionnel donne à leur parole une valeur inestimable. Journaliste d’expérience, Catherine Bergman les interroge sur le plaisir qu’ils trouvent dans ce qu’ils font, leur militantisme et leur vision de la société ; sur leur corps, ses douleurs et la façon dont ils en prennent soin ; sur leur rapport aux autres générations, ce qu’ils ont encore à apprendre et l’héritage qu’ils souhaitent transmettre ; sur leur perception du temps et leur peur de la mort. Son livre est un petit bijou, une réflexion inspirante sur la vieillesse et l’art d’être vivant." (présentation de l'éditeur).
Le temps des rites. Handicaps et handicapés
Auteur : Jean-François Gomez. Édition : Presses de l'Université Laval, 2005, 192 p. "Il est temps aujourd’hui de modifier profondément notre regard sur les personnes handicapées et sur les « exclus » de toute catégorie, qu’ils soient ou non dans les institutions. Pour l’auteur du Temps des rites, l’occultation du symbolique, ou son déplacement en une société de « signes » qui perd peu à peu toutes formes de socialités repérable et transmissible produit des dégâts incalculables, que les travailleurs sociaux, plus que quiconque doivent intégrer dans leur réflexion. Il faudrait s’intéresser aux rituels et aux « rites de passage » qui accompagnaient jusque là les parcours de toute vie humaine, débusquer l’existence d’une culture qui s’exprime et s’insinue dans toutes les étapes de vie. On découvrira avec étonnement que ces modèles anciens qui ont de plus en plus de la peine à se frayer une voie dans les méandres d’une société technicienne sont d’une terrible efficacité."
Dépendances et protection (2006)
Textes des conférences du colloque tenu le 27 janvier 2006 à l'Île Charron. Formation permanente du Barreau du Québec. Volume 238. 2006
Dossier
Philia
3 documents associés
Dernière modification :
03 / 20 / 2006


Photo © Otto Kohler

Définition
Le mot grec philia, signifiant amitié, désigne aussi un groupe de réflexion fondé il y a cinq ans par des amis de Colombie-britannique et du Québec. C’est à ce groupe, dont plusieurs membres de l’équipe de L’Agora font partie, que le présent dossier est consacré. Amitié (en général) est le premier sens du mot philia, mais Aristote donne parfois à ce mot le sens d’amitié civique, ce sentiment d’attachement, différent de l’amitié entre deux personnes, qui lient entre eux les membres d’une cité. C’est ce sens particulier du mot philia que les fondateurs du groupe de réflexion avaient à l’esprit quand ils l’ont choisi pour désigner leur projet. «La philia, quel que soit l'équivalent français adopté, c'est la réserve de chaleur humaine, d'affectivité, d'élan et de générosité (au-delà de la froide impartialité et de la stricte justice ou de l'équité) qui nourrit et stimule le compagnonnage humain au sein de la Cité: et cela à travers les fêtes, les plaisirs et les jeux comme à travers les épreuves. La philia, c'est aussi le sentiment désintéressé qui rend possible de concilier, comme le veut Aristote, la propriété privée des biens et l'usage en commun de ses fruits, conformément au proverbe -repris par l'auteur de la Politique à l'appui de sa thèse opposée à celle de Platon- qu'entre amis "tout est commun"». (Jean-Jacques Chevalier, Histoire de la pensée politique, tome 1, Payot, Paris 1979.)

Rappelons que, pour Aristote, l’homme est un être naturellement sociable,un zoon politikon, et que, par conséquent, dans des conditions normales , il devrait suffire pour le civiliser de ne pas nuire à l’expression de sa sociabilité naturelle. Par cet appel à Aristote, les fondateurs de Philia prenaient leurs distances par rapport à la thèse selon laquelle« l’homme est un loup pour l’homme.» Cette thèse, formulée pour la première fois par le poète latin Plaute, a ses racines modernes chez Hobbes. Elle nous invite à la méfiance à l'égard de l'autre, à des pratiques et des institutions de même inspiration.

Il y a cinq ans, je recevais la visite d’une personne de Vancouver, Al Etmanski, dont on m’avait dit le plus grand bien, en précisant qu’il était l’un des principaux artisans du succès de la désinstitutionalisation en Colombie britannique. Évoquant tantôt le souvenir d’Ivan Illich, tantôt celui de John McKnight, deux personnes que je connaissais bien, avec lesquelles j’avais des rapports amicaux, il me fit part de ses réalisations, de ses idées et de ses rêves. «Il faut cesser de réduire les personnes handicapées à leurs droits, il faut prendre acte du fait qu’elles ont aussi, comme tous les autres citoyens, des obligations et des dons qui leur sont propres. Quant aux communautés, elles se privent de richesses essentielles en ne profitant pas des dons des personnes handicapées et de leur contribution à la vie commune.» Quelque temps auparavant, j’avais rencontré Ivan Illich à l’Université de Pennsylvanie. Il était accompagné d’une amie allemande souffrant d’une maladie mentale légère mais suffisamment marquée pour que chacun voit qu’elle n’était pas normale. La présence de cette femme, nous l’appellerons Gretchen, à une rencontre d’intellectuels, avait quelque chose d’insolite, mais comme ces intellectuels étaient d’abord des amis, ils se réjouirent de ce que leur cercle soit ainsi élargi. Elle se rendit utile de mille façons, en s’occupant du système de son par exemple et participa à nos conversations par un sourire bienveillant qui leur donnait un sens non prévu à l’agenda. Lors de cette rencontre, John Mcknight avait de son côté raconté l’histoire d’une personne handicapée, appelons-là George, engagée dans un hôpital de Chicago avec mission d’assurer la distribution du courrier interne. Il pouvait arriver que cette personne dépose au quatrième étage une enveloppe destinée au cinquième, mais en raison du sourire de George, l’hôpital gagnait beaucoup plus en humanité qu’il ne perdait au plan de l’effacité immédiate. Une erreur commise par George. sympathique à tous, était souvent pour deux ennemis à l’intérieur de l’institution une occasion de se réconcilier.

Ce souvenir, s’ajoutant à tous ceux du village où j’ai grandi, m’aidait à comprendre les propos d’Al Etmanski : George comme Gretchen remplissaient leurs obligations, apportaient leur contribution à une collectivité et l’enrichissait de leurs dons. Mais dans le cas d’une personne très gravement handicapée, alitée et à jamais réduite au silence, quel peut être le sens de mots comme obligation, contribution, dons? Al Etmanski m’a invité à réfléchir avec lui à ces questions et c’est ainsi que notre groupe a pris forme. Avec Vickie Cammack, il dirigeait déjà un organisme, Plan (pour planned life advocacy network) qui, sur le terrain, apportaient des éléments de réponse à ma question. Il s’agit d’une association fondée en Colombie britannique par des parents de personnes handicapées dans le but d’assurer l’avenir de ces personnes dans la cité, hors des institutions, par un appel discret aux ressources de la communauté. Cet appel consiste parfois à demander à quelques personnes de la communauté si elles accepteraient de faire partie d’un groupe d’amis de telle ou telle personne handicapée qui ne trouve plus dans sa famille le soutien dont elle a besoin.

Jusqu’à ce jour, en Colombie britannique comme partout ailleurs au Canada, on avait mis l’accent sur les droits des personnes handicapées et les obligations de la société, de l’État à leur endroit. À PLAN, on a abordé la question dans une perspective opposée, on a invité les communautés à s’interroger sur la façon dont elles pourraient s’enrichir en accordant une meilleure vie aux personnes handicapées. Conséquemment, on a mis en relief, dans l’ordre de l’être, comme dans l’ordre du faire, les qualités dont les personnes handicapées peuvent faire profiter leur communauté. Qui pourrait nier l’importance et la signification du sourire d’une personne handicapée dans un contexte où les jeunes les plus normaux sont tentés par le désespoir? Au cours des dernières années, PLAN a essaimé dans plusieurs régions du Canada et plusieurs pays étrangers.

Les fondateurs de PLAN, Al Etmanski et Vickie Cammack, ont vite compris que leur action ne serait durable et féconde que dans la mesure où elle serait associée à une philosophie sociale élargie s’inspirant des mêmes principes. Ce sont là d’autres raisons qui les ont incité à s’associer avec des personnes du Québec, puis de l’Ontario pour fonder le groupe Philia. (J.D.)

Enjeux
Extraits d'un article publié dans cette Encyclopédie.

Les milliers de personnes âgées, mortes en cet été 2003 en France, de silence, de solitude et de chaleur auront été l’une des manifestations d’un désordre dont il existe plusieurs autres symptômes dans nos sociétés riches. Il y a désordre, nous rappelle Simone Weil, lorsque se multiplient les situations où il faut choisir entre deux obligations également fondamentales : par exemple, dans le cas d’un couple d’âge moyen, veiller sur ses vieux parents ou offrir à ses enfants des vacances qui leur permettront de relever le défi des études sans mettre leur santé en péril. En France, cet été, trop de couples ont négligé leurs vieux parents.

Au moment où ces mauvaises nouvelles venant d’Europe se multipliaient, on apprenait qu’au Canada 46% des médecins sont dans un état de burnout avancé et que parmi ces gardiens de la santé personnelle et publique, le taux de suicide était deux fois plus élevé que dans la moyenne de la population. La même étude nous rappelait que 40% de la population active souffre du même mal, associé au travail et plus précisément à la difficile conciliation des exigences du travail et de celles de la vie de famille. Pendant la même canicule, les corps rassemblés sur les plages du Pacifique et de l’Atlantique rendaient manifeste le fait que l’obésité est une catastrophe nationale aux États-Unis. Derrière ces maux visibles, la souffrance des personnes handicapées, des malades mentaux et de leur famille, qui trouvent rarement autour d’eux le soutien dont ils auraient besoin. Les itinérants sont l’aspect visible de ce problème.

Chacun de ces symptômes a ses causes particulières, mais il en est une générale qui est commune à tous : le système technicien. On peut diviser la société en trois sphères : le marché, l’État et la sphère du don, que nous appellerons la philia, à l’instar de Philippe Chanial 2. Bien que l’on n’en tienne pas compte dans la plupart des analyses, cette dernière a conservé une grande importance même dans les sociétés où l’État et le marché semblent se partager tout l’espace.

L’État, le marché, et dans une moindre mesure la philia sont sous l’empire du système technicien, qui fut si bien analysé par Jacques Ellul. [...]

Nous nous épuisons nous-mêmes à épuiser notre habitat, compromettant ainsi l’avenir de nos enfants. Nous nous rendons malades, nous nous brûlons, littéralement, nous et nos communautés, pour soutenir la croissance d’une efficacité, dont les effets pervers, la dilapidation du capital naturel, sont devenus plus importants que les bienfaits. C’est là une situation idéale en un sens : les remèdes a nos maux sont aussi les remèdes aux maux de la nature

Une croissance qui conviendrait à la fois aux hommes et à la nature serait caractérisée par un renversement de la tendance actuelle : au lieu d’être envahie par les sphères du marché et de l’État, et d’être considérée comme négligeable, la philia serait considérée comme la plus importante des trois et servirait de modèle aux deux autres. À noter que je parle de croissance. Dans l’état actuel des choses, un idéal de croissance zéro serait désespérant. Et de même qu’il faut éviter le rejet simpliste de l’efficacité, il faut pour les mêmes raisons continuer de miser sur l’État et le marché. [...]

Choisir la philia

Choisir la philia comme fondement d’une politique, c’est donner raison à Aristote pour qui l’homme est un zoon politikon, un animal naturellement sociable, contre Hobbes pour qui l’homme est un loup pour l’homme. Cette sombre idée sert de fondement à notre marché, centré sur le calcul et les intérêts de chacun. C’est le règne de la méfiance, par opposition à celui de l’amitié.

Choisir la philia c’est s’engager à faire le nécessaire pour que les personnes handicapées, les malades mentaux et leur famille reçoivent le soutien dont ils ont besoin. Notre honneur en tant que membres d’une société moderne est en cause. Jadis la vie des personnes handicapées était généralement brève et leur exclusion de la société était admise, les Églises leur offrant des refuges. Au moment précis où la science rendait possible pour les personnes handicapées une vie plus longue et meilleure, on jugea les refuges qui leur étaient offerts indignes d’elles. Ce fut le début de la désinstitutionnalisation. Les familles naturelles ou les familles d’accueil allaient devoir prendre le relais des refuges. Si ces personnes ne reçoivent pas de leur communauté et indirectement de l’État le soutien dont elles ont besoin, il faudra bientôt ouvrir de nouvelles institutions. Pour assurer ce soutien, il conviendrait si nécessaire de renoncer à la gratuité de certains services médicaux dont l’efficacité est douteuse.

Choisir la philia c’est aussi choisir d’accorder la primauté dans l’État et dans le marché à l’accomplissement des personnes. Il ne s’agit pas là d’une résignation suicidaire à l’inefficacité mais d’un pari sur cette efficacité d’un autre ordre qui est souvent donnée par surcroît dans les situations où existent les conditions de la créativité et de la responsabilité. Bien qu’elle n’échappe pas toujours à une naïveté frôlant le ridicule, la littérature actuelle sur les organisations apprenantes mérite toute notre attention. Qui donc n’a pas eu l’occasion de s’émerveiller des résultats obtenus par une équipe d’êtres libres et amis les uns des autres travaillant à leur rythme et en réseau à une oeuvre qui a un sens?

Choisir la philia c’est inviter les États et les entreprises à accorder plus d’importance à la confiance. Un responsable du service des achats surveillé par une personne plutôt que par cinq comme c’est le cas dans les hôpitaux du Québec, sera plus tenté de tirer des avantages personnels de son poste, mais pour un qui succombera à cette tentation, et qu’il sera facile de congédier, neuf seront plus heureux et plus productifs.

Choisir la philia c’est s’engager à substituer l’humanité des choix amicaux à la rectitude des choix bureaucratiques. Quel directeur d’école, quelle directrice d’hôpital, quel chef de département dans un Ministère n’ont pas rêvé de former de bonnes équipes en retenant comme critère d’embauche principal les affinités avec le groupe déjà formé plutôt que l’ordre déterminé par l’ancienneté.

Choisir la philia c’est inviter les syndicats et les associations patronales à subordonner la communauté de ressemblance à la communauté de solidarité. La communauté de ressemblance est celle qui réunit soit des personnes ayant une activité semblable, soit des personnes du même âge, quel que soit le lieu où elles habitent. La communauté de solidarité est celle qui réunit toutes les personnes, si différentes soient-elles, vivant dans un même lieu. Plutôt que de s’enraciner dans le milieu où vivent leurs employés, les patrons préfèrent souvent se réfugier dans les beaux quartiers et cherchent la compagnie de leurs homologues plutôt que celle de leurs voisins. La mondialisation aura aggravé ce problème. Les employés à leur tour se rapprochent de leurs semblables, ce qui contribue à dissoudre les communautés de solidarité. C’est l’une des causes de la solitude de bien des gens. Dans le même esprit, les autorités politiques devraient favoriser un développement qui favorise les communautés de solidarité.

Choisir la philia c’est miser d’abord sur les réseaux naturels plutôt que sur les services rendus par des professionnels, sans toutefois renoncer à la compétence de ces derniers, ce qui suppose qu’on ait d’abord recours à eux pour soutenir la résilience des réseaux naturels, là elle est encore possible, ou pour susciter l’apparition de réseaux artificiels légers, là où il n’y a pas d’autres solutions possibles.

Choisir la philia c’est inviter les gens à organiser leur temps privé de façon à ce qu’il y ait place pour le dialogue et la réflexion sur le sens de la vie. C’est inciter l’État à organiser le temps public selon les mêmes principes. L’ouverture des commerces jour et nuit toute la semaine n’est pas une décision heureuse de ce point de vue. La semaine sans télévision, organisée chaque année par des groupes de parents et d’élèves dans de nombreux pays, est un bel exemple des efforts qui peuvent être faits pour organiser le temps privé de façon à ce que l’âme puisse y respirer.

Choisir la philia c’est inviter les fondations et les autres groupes privés de bienfaisance à jouer un rôle accru dans les communautés en évitant toutefois d’imiter l’État ou le marché, en favorisant au contraire les initiatives qui auront pour effet de faire pénétrer l’esprit du don et les règles de l’amitié dans le marché et dans l’État.

Choisir la philia c’est veiller à ce que la règle de droit ne nuise pas à la vie sociale, c’est faire en sorte, par exemple, que la crainte d’une poursuite en responsabilité n’incite les gens à refuser de pratiquer l’hospitalité. Combien de gens s’abstiennent d’offrir leur aide à des familles hébergeant une personne handicapée parce qu’ils s’estiment incompétents et que pour cette raison ils craignent d’être tenus responsables d’un accident. (J.D)

Essentiel
Les personnes les plus gravement handicapées, souvent r/duites à l'immobilité et au silence peuvent-elles accéder a la philia, sont-elles des citoyens?

Extrait d'une conf/rence de Jacques Dufresne dans le cadre du XIIe colloque thématique annuel de l’Institut québécois de la déficience intellectuelle.

«Je m’adresse à ceux et celles, parents ou professionnels, qui consacrent une partie de leur vie à des personnes gravement handicapées. Que sont-elles donc ces personnes pour que vous leur accordiez une telle importance? Ne les aurait-on pas exclues jadis parce qu'elles ne correspondaient pas à la définition de l'homme: animal raisonnable?

Ne me répondez pas: vos actes sont la plus belle et la plus vraie de toutes les réponses possibles. Vos actes ont devancé les théories des savants et des philosophes.

Je connais au moins une conception de l’être humain qui est à la hauteur de vos actes et qui mériterait d’être à la source de nos lois et des décisions de nos juges. Elle est de Simone Weil. Je dois d’abord la situer dans son contexte, par-delà l’intelligence.

Quand Simone Weil annonça son intention de travailler comme ouvrière agricole, certains de ses amis la mirent en garde contre le risque qu’elle courait d’hypothéquer à jamais son génie en se livrant à des activités physiques qui dépassaient ses forces. Il faut ici préciser que Simone Weil était de santé fragile, qu’elle était depuis longtemps victime de migraines qui paraissaient incurables. Sa réponse à ceux qui se faisaient du souci pour l’avenir de son génie est l’un des passages les plus révélateurs de son œuvre: «Je m’attends aussi à assister à l’extinction de ma propre intelligence par l’effet de la fatigue. Néanmoins je regarde le travail physique comme une purification – mais une purification de l’ordre de la souffrance et de l’humiliation. On trouve aussi, tout au fond, des instants de joie profonde, nourricière, sans équivalent ailleurs. Pourquoi attacherai-je beaucoup de prix à cette partie de mon intelligence dont n’importe qui, absolument n’importe qui, au moyen de fouets et de chaînes, ou de murs et de verrous, ou d’un morceau de papier couvert de certains signes, peut me priver? Si cette partie est le tout, alors je suis tout entière chose de valeur presque nulle, et pourquoi me ménager? S’il y a autre chose d’irréductible, c’est cela qui a un prix infini. Je vais voir s’il en est ainsi.» 1

Simone Weil aura par diverses expériences la preuve qu’il en est ainsi. Elle pourra donc écrire ces lignes où je vois l’ébauche de la vision de l’homme et du monde dont nous aurions besoin pour respirer à l’aise sur les sommets où les idéaux modernes nous ont conduits. Je cite : «Il y a depuis la petite enfance jusqu’à la tombe, au fond du cœur de tout être humain, quelque chose qui, malgré toute l’expérience des crimes commis, soufferts et observés, s’attend invinciblement à ce qu’on lui fasse du bien et non du mal. C’est cela avant toute chose qui est sacré en tout être humain. »

S’il n’a pas l’intelligence du bien et du mal, il a la sensibilité à ce qui lui fait du bien ou du mal. Par delà la raison des modernes, nous retrouvons l’âme qui fonde la compassion au cœur des plus grandes religions.
Texte complet de la conférence.

Documentation
Philia, magazine L'Agora, vol 5, no 2, juillet-août 1998.

Documents associés
La proposition Philia. Réflexions sur la maladie mentale et la déficience intellectuelle
Auteur: Jacques Dufresne
Extrait: Il y a deux grands mystères dans la condition humaine, disait le psychiatre Karl Stern, la mort et la maladie mentale. J'ai vécu très près de ces mystères au cours des derniers jours. À cause de cette conférence, que je préparais mentalement, à cause aussi de mon engagement dans le projet Philia, j'ai eu maintes occasions de réfléchir sur le sort des malades mentaux et sur les personnes souffrant de déficiences intellectuelles. Ce matin, j'assistais aux funérailles de mon unique frère.
Les personnes vulnérables face à la crise
Auteur: Jacques Dufresne
Extrait: Tant qu'on considérera les personnes les plus vulnérables comme un fardeau pour les sociétés plutôt que comme des ferments de sociabilité, on aura tendance à en faire des boucs émissaires en période de crise.
Un conte californien
Auteur: Marc Twain
Philia, amitié, folie, voyage
Extrait: C’est la philia, cette amitié qui fonde et qui fait les communautés, que nous retrouvons dans ce conte de l'illustre écrivain américain. Nous avons choisi de traduire ce conte de Mark Twain parce que nous pensons qu’il illustre de façon admirable comment, à une époque où les seuls moyens existants en cas d’un malheur comparable à celui de Henry, étaient ceux d’une concertation de quelques amis fidèles pour empêcher qu’il ne sombre dans une angoisse mortelle.
Recherche
Raccourcis
Synonymes
amitié, entraide
Antonymes
malveillance
Allemand
Philia
Anglais
Philia
Espagnol
Philia
À lire également dans L'Encyclopédie de L'Agora
Dossiers
Résilience
Aristote
Amitié
Citoyen
Handicapé
Don
Économie
La logique du don
Jacques T. Godbout
Réciprocité, équivalence, philia, convivialité
Littératures
La compassion et l'hospitalité dans l'oeuvre d'Homère
Jacques Dufresne
Altérité, compassion, hospitalité, philia, démocratie, Grèce archaïque
Philosophie
L'essence de la Philia
Jacques Dufresne
Propriété privée, générosité, philia
Sociétés / Groupes
Amour des proches et sens communautaire
Al Etmanski
Philia, intégration de la personne handicapée, expérience de l'organisme PLAN, amitié, pouvoir de l'amitié
Revitaliser nos communautés
Al Etmanski
Entraide, solidarité, participationisme, philia
Charte des obligations
Al Etmanski
Présence, compassion, philia
Soins de santé
Le maintien à domicile : un état de situation
Serge Trépanier
Services de maintien à domicile, philia
Les soins d'aide à la personne
Coalition Solidarité Santé
Soins à domicile . CLSC, philia
Vie personnelle
Le philosophe qui vivait dans un jardin
Gilbert Romeyer Dherbey
Plaisir, limite, philia
La compétence amicale en réadaptation
Jacques Dufresne
Amitié, compassion, amour, Laurent Grenier, philia
Amour des proches
Al Etmanski
Handicap, intégration, citoyenneté, philia
La résilience sociale
Jacques Dufresne
Communauté, hippocratisme social, philia, kairos, tardigrade, action
Déficience intellectuelle, justice, communauté
Jacques Dufresne
Philia, amitié, résilience, euthanasie
Vers une réforme fiscale verte
Dominique Collin
État, impôts, taxes, développement durable, municipalités, philia
La restauration des écosystèmes
René Dubos
écosystèmes, développement durable, résilience, régénération, renaissance, philia, Krakatoa, Lac Saint-Jean, Aldo Leopold
La philia et la liberté
Jacques Dufresne
Bernard Charbonneau, philia, communauté
La famille ou la voie humaine
Jacques Dufresne
Histoire de la famille, famille nucléaire, famille contemporaine, divorce, durée de la vie conjugale, socialisation, secteur communautaire, philia, temps familial, conciliation famille-travail, pénurie de temps, social-démocratie, voie humaine
Repenser la cité à la mesure de l’homme
Dominique Collin
Organisation sociale, humus social, urbanisme, communauté, gouvernance, valeurs, Jane Jacobs, philia
La société civile, l'État subsidiaire et la responsabilité civique au Québec
Marc Chevrier
société civile, subsidiarité, citoyenneté, État, marché, marché financier, philia
Le choix et la société civile québécoise
Gary Caldwell
Sociabilité obligée, sociabilité élective, Québec(état), philia, société civile, marché, marché financier
Le réseau de la compassion
Vickie Cammack
Philia, communauté, voisinage, solitude, compassion, société civile