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Revue Le partenaire
Créée en 1992, la revue le partenaire est devenue au Québec une voix importante pour les personnes utilisatrices de services en santé mentale et pour tous les acteurs concernés par la réadaptation psychosociale, le rétablissement et la problématique de la santé mentale. Ses éditoriaux, ses articles, ses dossiers proposent une information à la fine pointe des connaissances dans le champ de la réadaptation psychosociale. Ils contribuent à enrichir la pratique dans ce domaine et à stimuler le débat entre ses membres.
Destination El Paradiso
El Paradiso n’est pas une maison de retraite comme les autres. Située dans une île enchanteresse qui est réservée à son usage, elle accueille des pensionnaires bien particuliers. Ce sont, par un aspect ou l’autre de leur vie, par ailleurs tout à fait honorable, des originaux, des excentriques, habités par une douce folie, qui n’a sans doute d’égal que la simplicité de leur bonheur. C’est une galerie de personnages un peu fantasques que nous fait rencontrer cet ouvrage tout empreint de tendresse, d’humour et d’humanité. Voici donc les premiers douze membres de ce club très spécial: Perry Bedbrook, Guy Joussemet, Édouard Lachapelle, Andrée Laliberté, Céline Lamontagne, Guy Mercier, Avrum Morrow, Lorraine Palardy, Antoine Poirier, Michel Pouliot, Charles Renaud, Peter Rochester.
Le Guérisseur blessé
Le Guérisseur blessé de Jean Monbourquette est paru au moment où l’humanité entière, devant la catastrophe d’Haïti, s’est sentie blessée et a désiré contribuer de toutes sortes de façons à guérir les victimes de ce grand malheur. Bénéfique coïncidence, occasion pour l’ensemble des soignants du corps et de l’âme de s’alimenter à une source remarquable. Dans ce livre qui fut précédé de plusieurs autres traitant des domaines de la psychologie et du développement personnel , l’auteur pose une question essentielle à tous ceux qui veulent soigner et guérir : « Que se cache-t-il derrière cette motivation intime à vouloir prendre soin d’autrui? Se pourrait-il que la majorité de ceux et celles qui sont naturellement attirés par la formation de soignants espèrent d’abord y trouver des solutions à leurs propres problèmes et guérir leurs propres blessures? » Une question qui ne s’adresse évidemment pas à ceux qui doivent pratiquer une médecine de guerre dans des situations d’urgence!
Mémoire et cerveau
Dans ce numéro de La Recherche, on se limite à étudier la mémoire dans la direction indiquée par le psychologue torontois Endel Tulving, reconnu en en ce moment comme l'un des grands maîtres dans ce domaine. Cela confère au numéro un très haut degré de cohérence qui en facilite la lecture. Culving est à l'origine de la distinction désormais universellement admise entre la « mémoire épisodique » portant sur des événements vécus et la « mémoire sémantique » portant sur des concepts, des connaissances abstraites. C'est la première mémoire que je mets en œuvre quand je m'efforce d'associer des mots à un événement passé, un voyage par exemple; je m'en remets à la seconde quand je m'efforce d'associer des mots automatiquement les uns aux autres, abstraction faite de tout événement vécu auquel ces mots pourraient se rapporter. Au cours de la décennie 1960, Tulving a constaté que les résultats obtenus grâce au premier exercice étaient beaucoup moins bons que ceux obtenus par le second exercice, ce qui l'a incité à faire l'hypothèse qu'il existe deux mémoires distinctes.
Spécial Mémoire
Dans ce numéro de La Recherche, on se limite à étudier la mémoire dans la direction indiquée par le psychologue torontois Endel Tulving, reconnu en en ce moment comme l'un des grands maîtres dans ce domaine. Cela confère au numéro un très haut degré de cohérence qui en facilite la lecture. Culving est à l'origine de la distinction désormais universellement admise entre la « mémoire épisodique » portant sur des événements vécus et la « mémoire sémantique » portant sur des concepts, des connaissances abstraites. C'est la première mémoire que je mets en œuvre quand je m'efforce d'associer des mots à un événement passé, un voyage par exemple; je m'en remets à la seconde quand je m'efforce d'associer des mots automatiquement les uns aux autres, abstraction faite de tout événement vécu auquel ces mots pourraient se rapporter. Au cours de la décennie 1960, Tulving a constaté que les résultats obtenus grâce au premier exercice étaient beaucoup moins bons que ceux obtenus par le second exercice, ce qui l'a incité à faire l'hypothèse qu'il existe deux mémoires distinctes.
L'itinérance au Québec
La personne en situation d’itinérance est celle : […] qui n’a pas d’adresse fixe, de logement stable, sécuritaire et salubre, à très faible revenu, avec une accessibilité discriminatoire à son égard de la part des services, avec des problèmes de santé physique, de santé mentale, de toxicomanie, de violence familiale ou de désorganisation sociale et dépourvue de groupe d’appartenance stable. Cette définition met en évidence la complexité du phénomène et l’importance de l’aspect multifactoriel des éléments déclencheurs tels que la précarité résidentielle et financière, les ruptures sociales, l’accumulation de problèmes divers (santé mentale, santé physique, toxicomanie, etc.). L’itinérance n’est pas un phénomène dont les éléments forment un ensemble rigide et homogène et elle ne se limite pas exclusivement au passage à la rue.L’itinérance est un phénomène dynamique dont les processus d’exclusion, de marginalisation et de désaffiliation en constituent le coeur.
L’habitation comme vecteur de lien social
Evelyne Baillergeau et Paul Morin (2008). L’habitation comme vecteur de lien social, Québec, Collection Problèmes sociaux et intervention, PUQ, 301 p. Quel est le rôle de l’habitation dans la constitution d’un vivre ensemble entre les habitants d’un immeuble, d’un ensemble d’habitations ou même d’un quartier ? Quelles sont les répercussions des conditions de logement sur l’organisation de la vie quotidienne des individus et des familles et sur leurs modes d’inscription dans la société ? En s’intéressant à certaines populations socialement disqualifi ées, soit les personnes ayant des problèmes de santé mentale et les résidents en habitation à loyer modique, les auteurs étudient le logement non seulement comme l’un des déterminants de la santé et du bien-être, mais également comme un lieu d’intervention majeur dans le domaine des services sociaux. De la désinstitutionnalisation à l’intégration, des maisons de chambres aux HLM, ils décrivent et analysent des expériences ayant pour objectif le développement individuel et collectif des habitants et les comparent ensuite à d’autres réalisées au Canada, aux Pays-Bas et en Italie. Pour en savoir plus : http://www.puq.ca
Revue Développement social
On a longtemps sous-estimé l'importance du lien entre les problèmes environnementaux et la vie sociale. Nous savons tous pourtant que lorsque le ciel est assombri par le smog, on hésite à sortir de chez soi pour causer avec un voisin. Pour tous les collaborateurs de ce numéro consacré au développement durable, le côté vert du social et le côté social du vert vont de soi. La vue d'ensemble du Québec qui s'en dégage est enthousiasmante. Les Québécois semblent avoir compris qu'on peut redonner vie à la société en assainissant l'environnement et que les défits à relever pour assurer le développement durable sont des occasions à saisir pour resserrer le tissu social.
La réforme des tutelles: ombres et lumières.
En marge de la nouvelle loi française sur la protection des majeurs, qui doit entrer en vigueur en janvier 2009. La France comptera un million de personnes " protégées " en 2010. Le dispositif actuel de protection juridique n'est plus adapté. Ce " livre blanc " est un plaidoyer pour une mise en œuvre urgente de sa réforme. Les enjeux sont clairs lutter contre les abus, placer la protection de la personne, non plus seulement son patrimoine, au cœur des préoccupations, associer les familles en les informant mieux, protéger tout en respectant la dignité et la liberté individuelle. Le but est pluriel. Tout d'abord, rendre compte des difficultés, des souffrances côtoyées, assumer les ombres, et faire la lumière sur la pratique judiciaire, familiale et sociale ; Ensuite, expliquer le régime juridique de la protection des majeurs, et décrire le fonctionnement, les bienfaits, et les insuffisances ; Enfin, poser les jalons d'une réforme annoncée comme inéluctable et imminente mais systématiquement renvoyée à plus tard. Les auteurs: Michel Bauer, directeur général de l'Udaf du Finistère, l'une des plus grandes associations tutélaires de France, anime des groupes de réflexion sur le sujet et œuvre avec le laboratoire spécialisé de la faculté de droit de Brest. II est l'auteur d'ouvrages sur les tutelles et les curatelles. Thierry Fossier est président de chambre à la cour d'appel de Douai et professeur à l'Université d'Auvergne, où il codirige un master et l'IEJ. II est fondateur de l'Association nationale des juges d'instance, qui regroupe la grande majorité des juges des tutelles. II est l'auteur de nombreuses publications en droit de la famille et en droit des tutelles. Laurence Pécaut-Rivolier, docteur en droit, est magistrate à la Cour de cassation. Juge des tutelles pendant seize ans elle préside l'Association nationale des juges d'instance depuis plusieurs années.
Puzzle, Journal d'une Alzheimer
Ce livre, paru aux Éditions Josette de Lyon en 2004, a fait l'objet d'une émission d'une heure à Radio-France le 21 février 2008. Il est cité dans le préambule du rapport de la COMMISSION NATIONALE CHARGÉE DE L’ÉLABORATION DE PROPOSITIONS POUR UN PLAN NATIONAL CONCERNANT LA MALADIE D’ALZHEIMER ET LES MALADIES APPARENTÉES. Ce rapport fut remis au Président de la République française le 8 novembre 2007. «Je crois savoir où partent mes pensées perdues : elles s’évadent dans mon coeur…. Au fur et à mesure que mon cerveau se vide, mon coeur doit se remplir car j’éprouve des sensations et des sentiments extrêmement forts… Je voudrais pouvoir vivre le présent sans être un fardeau pour les autres et que l’on continue à me traiter avec amour et respect, comme toute personne humaine qui a des émotions et des pensées,même lorsque je semble «ailleurs »1à.
Les inattendus (Stock)
Premier roman d'Eva Kristina Mindszenti, jeune artiste peintre née d’un père hongrois et d’une mère norvégienne, qui vit à Toulouse. Le cadre de l'oeuvre: un hôpital pour enfants, en Hongrie. «Là gisent les "inattendus", des enfants monstrueux, frappés de maladies neurologiques et de malformations héritées de Tchernobyl, que leurs parents ont abandonné. Ils gémissent, bavent, sourient, râlent, mordent parfois. Il y a des visages "toujours en souffrance" comme celui de Ferenc évoquant "le Christ à la descente de la croix". Tout est figé, tout semble mort. Pourtant, la vie palpite et la beauté s’est cachée aussi au tréfonds de ces corps suppliciés. » (Christian Authier, Eva Kristina Mindszenti : une voix inattendue, «L'Opinion indépendante», n° 2754, 12 janvier 2007)
En toute sécurité
Cet ouvrage est l'adaptation québécoise de Safe and secure, publié par les fondateurs du réseau PLAN (Planned Lifetime Advocacy Network) et diffusé au Québec par un groupe affilié à PLAN, Réseaux pour l'avenir. Il s'agit d'un guide pratique dont le but est d'aider à les familles à planifier l'avenir "en toute sécurité" des membres de leur famille aux prises avec un handicap.
"Il faut rester dans la parade ! " - Comment vieillir sans devenir vieux
Auteur : Catherine Bergman. Éditeur : Flammarion Québec, 2005. "Dominique Michel, Jacques Languirand, Jean Béliveau, Antonine Maillet, Jean Coutu, Gilles Vigneault, Hubert Reeves, ils sont une trentaine de personnalités qui, ayant dépassé l’âge de la retraite, sont restés actives et passionnées. Ils n’ont pas la prétention de donner des conseils ni de s’ériger en modèles, mais leur parcours exceptionnel donne à leur parole une valeur inestimable. Journaliste d’expérience, Catherine Bergman les interroge sur le plaisir qu’ils trouvent dans ce qu’ils font, leur militantisme et leur vision de la société ; sur leur corps, ses douleurs et la façon dont ils en prennent soin ; sur leur rapport aux autres générations, ce qu’ils ont encore à apprendre et l’héritage qu’ils souhaitent transmettre ; sur leur perception du temps et leur peur de la mort. Son livre est un petit bijou, une réflexion inspirante sur la vieillesse et l’art d’être vivant." (présentation de l'éditeur).
Le temps des rites. Handicaps et handicapés
Auteur : Jean-François Gomez. Édition : Presses de l'Université Laval, 2005, 192 p. "Il est temps aujourd’hui de modifier profondément notre regard sur les personnes handicapées et sur les « exclus » de toute catégorie, qu’ils soient ou non dans les institutions. Pour l’auteur du Temps des rites, l’occultation du symbolique, ou son déplacement en une société de « signes » qui perd peu à peu toutes formes de socialités repérable et transmissible produit des dégâts incalculables, que les travailleurs sociaux, plus que quiconque doivent intégrer dans leur réflexion. Il faudrait s’intéresser aux rituels et aux « rites de passage » qui accompagnaient jusque là les parcours de toute vie humaine, débusquer l’existence d’une culture qui s’exprime et s’insinue dans toutes les étapes de vie. On découvrira avec étonnement que ces modèles anciens qui ont de plus en plus de la peine à se frayer une voie dans les méandres d’une société technicienne sont d’une terrible efficacité."
Dépendances et protection (2006)
Textes des conférences du colloque tenu le 27 janvier 2006 à l'Île Charron. Formation permanente du Barreau du Québec. Volume 238. 2006
Document associé
Vieillir sans fléchir
Dossier : Vieillesse
Dernière modification :
12 / 22 / 2009
Hélène Laberge

L'écrivain allemand Ernst Jünger à l'âge de 100 ans. Source: Stuttgarter Nachrichten

Extrait
Chez l’homme, traditionnellement, on invoquait le démon du midi pour désigner l’âge
critique de la cinquantaine. Heller s’attarde plutôt à décrire « l’équilibre intellectuel de la
maturité » qui s’instaure après l’âge critique. S’il y a décroissance de la mémoire,
l’absence d’agitation, le calme intérieur, observe-t-il, suppléent à merveille à la
déficience de la mémoire. » Sur le plan affectif, « la crise de la cinquantaine peut
provoquer une sorte de réouverture de l’affectivité, [...] une sorte de réviviscence du sens
de l’humain perdu depuis l’adolescence chez tant d’hommes. Certains, au cours de leur
poursuite acharnée de quelque réussite, s’étaient enfermés dans une sécheresse
particulièrement désespérante pour les jeunes sensibilités qui gravitaient autour d’eux. »
Et également, se développe une forme d’impartialité, car « l’expérience fait que le
quinquagénaire se retrouve plus indépendant vis à vis des événements ou des contacts
susceptibles de provoquer des réactions instinctives ».13 Cet équilibre se retrouve aussi
chez la femme, précise l’auteur.

Présentation
Dans notre récent dossier sur la culture médicale nous avons accordé une large place au
docteur Nortin M. Hadler qui s'appuie sur la médecine factuelle pour prévenir le plus
grand mal qui menace la vieillesse: la médicalisation. Hélas, on a beau savoir que tel
traitement invasif et coûteux est inefficace, cela ne fait disparaître ni le symptôme, ni
l'angoisse qui l'accompagne. C'est ici que le médecin humaniste, espèce de plus en plus
rare hélas! a un rôle essentiel à jouer. Nous vous invitons à redécouvrir avec nous l'un de
ces médecins, Louis Lucien Heller.

Texte
Le vieillard, qui revient vers la source première,
Entre aux jours éternels et sort des jours changeants… Victor Hugo in Booz endormi


En 1949, Louis Lucien Heller publiait Les âges de l’homme1, un livre qui synthétisait de façon parfaitement claire les connaissances de ce temps sur la vie de l’être humain. Le docteur Heller
appartenait manifestement à cette génération de médecins de la première partie du XXe
siècle aussi humanistes que scientifiques. Les processus qu'il décrit correspondent-ils
toujours aux faits?Il y a bien des chances qu'un phénomène comme le ralentissement des
fonctions soit toujours au rendez-vous de la vieillesse. Ce vénérable savoir empirique ne
conduit certes pas à des traitements miraculeux; il aide toutefois celui qui le possède à
composer avec des maux dont il sait, ou devrait savoir, qu'ils sont les compagnons de
toute vieillesse. Il se prête aussi à une réconciliation des deux voies qu'on a peut-être eu
tort de séparer trop radicalement: celle de la spiritualité et celle de la médecine du corps.
Puisque la vie est la chute d'un corps, vaut-il mieux tenter de redresser ce corps
uniquement à l'aide de prothèses ou s'efforcer d'abord de faire croître en lui cet arbre
intérieur, mieux nourri par le soleil couchant que par le soleil de midi?
Vieillir! Vieux, vieillards, vieilles femmes, mots qu’on n’ose plus employer tant la rage
de vivre à tout prix, de vivre jeune, rajeuni à l’intérieur par les anti oxydants (au fait, ontils
fait leurs preuves?), les multivitamines, le Viagra, les hormones et tutti quanti; à
l’extérieur par des conditionnements physiques et des rectifications chirurgicales dites
esthétiques (car être vieux c’est être laid!!!), toutes ces formes d’embâcles au temps qui
passe, qui est passé, tous ces rituels sont devenus une religion. Une religion infiniment
plus aliénante que celles traditionnelles dont nous nous moquons. Nous déposons aux
pieds du dieu Jeunesse des offrandes dont ses grands prêtres (fabricants de drogues, de
cosmétiques et manieurs de bistouri) tirent les plus grands profits.
Réquisitoire de ceux dont la vie s’achève, dira la triomphante jeunesse! Désir inconscient
de cette jeunesse disparue. N’y aurait-il pas en chaque être qui vieillit un Faust2 désabusé
du savoir, de la gloire et des richesses et qui voudrait bien faire un pacte avec Méphisto
pour recouvrer ce « trésor qui les contient tous » la jeunesse?
Pacte tragique! C’est le thème du Faust de Gounod. Le vieux Faust désespéré vend son
âme à Méphisto en échange de la jeunesse. Transformé par Méphisto en jeune noble,
riche et beau, il séduit la vertueuse Marguerite avec l’aide de Méphisto et il s’ensuit une
série de malheurs : abandon de la jeune femme dont la grossesse hors mariage subit la
réprobation de la société et qui finit par tuer son enfant. Valentin qui veut sauver
l’honneur de sa soeur Marguerite provoque en duel Faust qui le tue. Emprisonnement de
Marguerite et remords de Faust qui veut la revoir. C’est Méphisto qui permet à Faust de
retrouver la prisonnière et l’amant redevenu amoureux lui demande de s’enfuir avec lui.
Mais voici que « Méphistophélès apparaît et supplie Faust et Marguerite de le suivre.
Marguerite résiste et en appelle à la protection divine. Désespéré; Faust (assiste à la mort
de Marguerite) et tombe en prière à genoux alors que l'âme de Marguerite s'élève vers les
cieux. » Libretto de l’opéra http://www.charles-gounod.com/oeuvres/operas/faust.htm
Goethe comme plusieurs auteurs au fil des siècles a été fasciné par le mythe du savant
Faust dans deux oeuvres dont la première (celle dont Gounod s’est inspiré) fut écrite alors
qu’il était jeune. Dans la dernière, écrire un an avant sa mort, il présente Faust comme un
philosophe qui d'abord risque tout, même son âme, pour faire progresser le savoir
humain mais revient vers la fin de sa vie à une forme de sagesse grâce à laquelle son
pacte avec Méphisto est annihilé. « Dieu lui accorde son pardon en raison de la noblesse
de ses intentions3 ».
Faust devenu vieux devient sage; il incarne sans doute l’ultime désir de Goethe, et
surtout, l’autre facette du vieillissement, l’acceptation du destin de l’être humain. Nous y
reviendrons. Restons-en pour le moment au mythe du premier Faust, celui qui vend son
âme pour retrouver la jeunesse. Pour la conserver tout au moins cette jeunesse « il y a eu
de tous temps, comme le souligne le docteur Heller, une efflorescence de théories
préconisant petits ou grands moyens pour prolonger non seulement non seulement la vie
de l’homme, mais encore sa période de juvénilité. En dehors des herbes et des philtres de
jeunesse, des sels de Sedlitz du Dr Burgraeve, du lait caillé de Metschikoff, etc…
(l’auteur fait état des procédés à la mode au début du XXe siècle), ce sont surtout les
principes d’hygiène et d’équilibre de vie, énoncés de tous temps et sous tous les cieux,
qui présentent le plus d’intérêt. Dénués d’éléments artificiels, correspondant bien à la
nature de l’homme et aux lois constantes régissant son existence, ces principes paraissent
cependant plus difficiles à observer qu’autrefois tant il est vrai, peut affirmer le
sociologue comme le biologiste, que l’homme s’est construit un monde qui ne lui profite
guère »4.
Prolonger la jeunesse du corps, ce désir est-il, en ce moment précis de notre histoire,
impossible à assouvir avec la découverte en particulier de l’hormonothérapie? Nous
reviendrons sur cette question dans un prochain article. Allons voir plutôt comment le
docteur Heller décrivait, il y a soixante ans, le processus du vieillissement qu’il situe
autour de la cinquantaine et qu’il voit comme « un branle-bas comparable à celui de
l’adolescence. Trois éléments caractérisent la cinquantaine : l’organisme entre nettement
dans une phase d’involution en ce sens qu’il commence à ressentir des limitations [...],
une plus grande fatigabilité, une réparation plus lente des forces. [...] Mais certaines
parties de cet organisme, et c’est là le deuxième élément, régressent sur un mode
révolutionnaire. » Ce sont divers fléchissements qui révèlent subitement la faiblesse d’un
organe. « Le troisième, qui passe le plus inaperçu, est cependant le plus important
puisqu’il marque une possibilité spécifique de l’homme : dissocier le cours de sa vie
intime du cours imposé à sa vie physique »5. Cette vie intime qui permet, à travers tous
les âges de la vie, d’acquérir la sagesse.
Heller donne une définition du vieillissement tirée du Dr Niéhans : « Le vieillissement est
un processus fort compliqué d’altérations fonctionnelles et structurelles qui conduit à la
déperdition des forces corporelles et intellectuelles, et transforme jusqu’aux tendances
psychiques de l’individu (disposition au pessimisme sénile). »
Son commentaire : [...] « Voir la vie en rose est le plus souvent la traduction en
impression sensible d’une vitalité florissante, d’une surabondance de forces; c’est un
optimisme fondé principalement sur une bonne activité de tous les organes avec sensation
vague de sécurité dans la persistance de cet état tonique et de la réussite qu’elle ne peut
manquer d’attirer. Or, tout est ralentissement dans l’organisme vieillissant [...], il n’y a
plus cette appétence de vie de l’organisme en croissance ou bien lancé dans la vie active;
les muscles n’ont plus de tonicité en réserve et leurs fibres elles-mêmes n’espèrent plus
rien que le repos. Il nous est facile, quelqu’âge que nous ayons, de sentir ces choses : il
n’est que de faire appel de ces jours de dépression, de lassitude profonde où nous avons
l’impression d’avoir cent ans… »6
Ralentissement des fonctions : nous résumons en quoi il consiste selon Heller : « Il s’agit
surtout, vers la cinquantaine, d’un changement de rythme de chaque fonction et de tout
l’organisme, et ce changement va commander un changement du rythme d’existence pour
l’individu. Si celui-ci obtempère et accepte d’adapter sa vie physique, son régime et son
activité au nouveau tonus des différents systèmes composant son organisme, il se
rétablira dans son équilibre. Cet équilibre ne se tiendra plus au niveau du maximum des
possibilités individuelles, ce ne sera plus l’équilibre dans l’épanouissement de la
maturité; néanmoins le quinquagénaire, sorti de l’âge critique, peut jouir d’une belle
harmonie organique [...] ». Il est remarquable que ce médecin ne parle jamais d’états
pathologiques pour désigner même les fléchissements de l’organisme!
Heller établit une importante distinction entre ces ralentissements du début de la
vieillesse et les fléchissements qui peuvent apparaître étant donné que chacun des organes
« peut être d’un âge réel différent. » En pleine maturité, « tout un jeu de compensations
effacent des déficiences locales; mais celles-ci apparaissent dans toute leur brutalité
lorsque l’organisme se ralentit et ne peut plus faire les frais de la compensation. » Des
exemples suivent : la faiblesse d’une jambe (séquelle d’accident ou de polio) induit un
boitillement après une journée fatigante; « un fléchissement rénal chez certains sujets
cause une colique néphrétique; on voit apparaître divers petits maux : troubles oculaires,
maux de tête, insomnies… » Des déficiences causées par un autre effet du vieillissement,
le ralentissement dans l’élimination des toxines. Autres effets : « le fléchissement du
système nerveux, fatigue excessive, crises de dépression, maux de tête, tremblements,
insomnies »7.
Le système circulatoire commence aussi à fléchir: « Le système glandulaire (notamment
les surrénales) et le système nerveux sympathique ne peuvent plus aussi bien que par le
passé se faire contrepoids; » en conséquence, [...] « l’émotion crée des phénomènes
vaso-moteurs plus marqués (rougeur de la face, ou plaques rouges au niveau du maxilaire
inférieur et du cou). Et surtout, l’émotion agira également plus brutalement sur le coeur
causant des palpitations d’une fréquence et d’une persistance inaccoutumée [...] Autre
manière pour le système circulatoire de manifester son fléchissement : cette fameuse
montée de la tension artérielle dont la célébrité a remplacé celle de la collibacillose! »
L’affaissement des parois vasculaires produit «des varices et hémorroïdes qui peuvent
d’ailleurs résulter de plusieurs causes ».8 Apparaît aussi un fléchissement de la
glyco-régulation mais déjà le docteur Heller distinguait dans ce fléchissement « à côté du
grand diabète [...] une autre forme plus discrète que l’on ne peut déceler que par une
observation soigneuse »9. (à l’heure actuelle on a adopté le mot d’hypoglycémie
pour désigner cette forme plus discrète! mot dont l’origine remonte à 1908 selon le
Larousse). Précisons, comme le fait à plusieurs reprises le docteur Heller, que ces
diverses manifestations se produisent progressivement à partir de la cinquantaine et
varient selon les personnes.
Heller décrit aussi « la décroissance [...] qui frappe la sphère génito-sexuelle »10. Chez la
femme, l’arrêt des règles, de l’ovulation et de la sécrétion de la principale hormone
féminine, la folliculine. Chez l’homme, l’hypertrophie de la prostate, « un phénomène si
général qu’il est plus physiologique que pathologique », souligne Heller, à la suite de
certains auteurs ».11 Suit une analyse des effets de ces transformations sur le psychisme
de la femme et de l’homme. Chez la femme, lors de la pré-ménopause, une phase hyperhormonale
due à l’excès de folliculine dans l’organisme. D’où une « exacerbation
momentanée de la libido. Dans ce cas tout se passe comme si une recrudescence
d’appétit génital et d’appétit amoureux cherchait à arracher à la mort la fonction à
laquelle ils sont si intimement liés ».12
Chez l’homme, traditionnellement, on invoquait le démon du midi pour désigner l’âge
critique de la cinquantaine. Heller s’attarde plutôt à décrire « l’équilibre intellectuel de la
maturité » qui s’instaure après l’âge critique. S’il y a décroissance de la mémoire,
l’absence d’agitation, le calme intérieur, observe-t-il, suppléent à merveille à la
déficience de la mémoire. » Sur le plan affectif, « la crise de la cinquantaine peut
provoquer une sorte de réouverture de l’affectivité, [...] une sorte de réviviscence du sens
de l’humain perdu depuis l’adolescence chez tant d’hommes. Certains, au cours de leur
poursuite acharnée de quelque réussite, s’étaient enfermés dans une sécheresse
particulièrement désespérante pour les jeunes sensibilités qui gravitaient autour d’eux. »
Et également, se développe une forme d’impartialité, car « l’expérience fait que le
quinquagénaire se retrouve plus indépendant vis à vis des événements ou des contacts
susceptibles de provoquer des réactions instinctives ».13 Cet équilibre se retrouve aussi
chez la femme, précise l’auteur.
Mais comment se fait cet équilibre? « Chaque organe, chaque fonction, entrés dans la
voie de la régression, vont s’adapter à cette évolution descendante comme ils s’étaient
adaptés progressivement , durant la phase de la prématurité, à l’évolution ascendante. En
somme il s’agit surtout, vers la cinquantaine, d’un changement de rythme de chaque
fonction et de tout l’organisme, et ce changement de rythme va commander un
changement du rythme d’existence pour l’individu. Si celui-ci obtempère et accepte
d’adapter sa vie physique , son régime et son activité au nouveau tonus des différents
systèmes composant son organisme, il se rétablira dans son équilibre »14.
Heller précise évidemment que cette décroissance peut s’étaler sur de nombreuses
années, « il faut tenir compte des différences de tempérament : un lymphatique, un
sanguin ou un nerveux n’ont pas leur apogée au même moment et les signes de
vieillissement différent d’une part et d’autre part ne surviennent pas au même moment. »
Mais les fléchissements et les ralentissements relèvent désormais « d’une responsabilité
plus directe de l’individu »15.
« Au point culminant de l’âge mûr, notre esprit, notre coeur, notre caractère sont issus
d’un complexe où se retrouvent, diversement dosées, les influences suivantes : notre état
physique, nos réactions individuelles à l’éducation reçue, notre genre de vie dans les
années écoulées, notre alimentation etc… » [...] « Les mauvais traitements infligés à telle
ou telle partie de l’organisme doivent se payer maintenant par un fléchissement sans
appel : on ne peut plus forcer les limites de résistance de l’organe fatigué. » Faut-il aussi
invoquer les gènes dont on a hérité ? Réponse du Dr Heller : « Dans l’ordre physique
comme dans l’ordre du caractère les traits héréditaires ne sont le plus souvent que des
tendances et non des marques imposées de manière brutale et inconditionnée ».16 . Et à
nouveau, l’accent est mis sur une nouvelle hygiène de vie dont les préceptes sont connus
depuis longtemps : mesure dans l’alimentation, exercices physiques appropriés, etc.
Mais ce qui donne à ce livre son caractère unique c’est l’importance que ce médecin
attache à la montée de la vie spirituelle qu’il distingue de la vie mentale; cette vie mentale
qui se déroule « d’une façon exactement parallèle aux âges physiques », alors que « la
vie spirituelle [...] échappe aux lois qui règlent le développement de l’individu. [...] La
vie mentale, qu’il s’agisse d’un simple prolongement de la vie physiologique, qu’il
s’agisse de l’affectivité ou des opérations rationnelles les plus compliquées, relève de la
psychologie de l’individu »17 . Ce lien entre la vie physiologique et la vie psychologique
« ne creuse pas un fossé entre vie spirituelle et vie psychologique, ces deux domaines ont
l’un vis-à-vis de l’autre des influences réciproques souvent déroutantes, mais dans l’ordre
du temps on n’avance pas selon les mêmes étapes dans les deux domaines ».18 Au corps
qui chute peut correspondre la montée d’une vie spirituelle. Si pour mener à bien sa vie
psychologique, « il faut être bien dans chacun de ses âges physiques, adolescence,
maturité vieillesse; au contraire, il s’agit pour mener à bien sa vie spirituelle, de
s’affranchir dans une certaine mesure de la vie physiologique, de la vie mentale (italique
de l’auteur) et des vicissitudes de leur développement. Puisque le propre de la vie
spirituelle est de nous mettre, pour ainsi dire dans un état sans âge qui les contient
tous »19..
Cet état sans âge, ou par-delà l’âge, peut-on l’appeler sagesse? La sagesse « n’est qu’une
partie de la vie spirituelle car elle comporte plusieurs âges intérieurs qui s’échelonnent de
l’acte de conscience à un véritable état stable de conscience. Car la sagesse est une prise
de conscience par l’homme de sa destinée, de ce qu’il doit devenir pour remplir cette
destinée;(ce n’est pas un assagissement), car c’est un mode de penser et de vivre issu
d’une connaissance particulière et non consécutive à une usure »20. Le stade suivant celui
de la sagesse est celui de la vie spirituelle proprement dite (italique de l’auteur); il se
différencie de la sagesse en ceci qu’il introduit à un état réellement supra-humain alors
que la sagesse est l’état humain le plus élevé auquel on puisse atteindre »Les
êtres humains « chez qui la recherche aboutit effectivement à une vraie vie spirituelle, au
fur et à mesure qu’ils progressent, voient s’estomper les oppositions; ils convergent les
uns vers les autres à mesure qu’ils se dépouillent de leurs particularités affectives et
cérébrales pour s’approcher de l’Un »21.
Il faudrait revenir sans fin sur ce livre dont les chapitres sur les divers âges de l’homme
forment une synthèse rare entre les connaissances physiologiques du médecin et les
observations pleines de finesse et de profondeur du psychologue. Gustave Thibon qui en
signe la préface aura le mot de la fin : « Ce qui m’a frappé avant tout, c’est l’accent
humain qui traverse sans cesse l’exposé objectif du médecin. Le docteur Heller ne se
borne pas à connaître l’homme : il l’aime, il le suit d’un regard de tendresse et de
compassion le long des chemins de la vie. »



Notes
1Éditions Alsatia, Paris, 1949. Préface de Gustave Thibon. -
2« Le docteur Faust incarne dans le domaine artistique la figure mythique du savant prêt à vendre son âme au diable en échange de l'accès au savoir universel. On suppose que le mythe tire son existence d'un personnage qui a réellement existé en Allemagne entre la fin du XVe siècle et le milieu du XVIe, le docteur Johann Faust, enseignant mais aussi illusionniste et diseur de bonne aventure : c'est pour
cela précisément qu'on l'accuse de sorcellerie, et qu'il est chassé de toutes les villes où il tente de s'établir. La légende dit qu'il s'est vanté d'avoir vendu son âme au diable avant de mourir d'une façon mystérieuse, ce qui a contribué à le rendre fort célèbre, au point que certains grands esprits de l'époque étaient persuadés qu'il était possédé par Satan. Pour d'autres, Faust était tout simplement un charlatan vivant dans la débauche, alors que d'autres encore prétendent que l'archevêque de Cologne en a fait son protégé à partir de 1532 et qu'il est mort en personne respectable. » Devenu un personnage mythique,
Faust a inspiré plusieurs auteurs dont Goethe et plusieurs compositeurs d’opéras et de poèmes symphoniques. Pour Gounod,Faust désire non le savoir universel mais la jeunesse. Pour en savoir davantage : .http://www.ac-strasbourg.fr/pedago/lettres/
Victor%20Hugo/Notes/Faust.htm
3 Ibid.
4 Heller, op.cit. p.222
5 Ibid. p. 155
6 Ibid. p.234
7 Ibid. p 161-162
8 Ibid. p.163
9 Ibid. p.164
10 Ibid. p.169
11 Ibid. p.183
12 Ibid. p.176
13 Ibid. p. 185-187
14 Ibid. p. 161
15 Ibid. p.157
16 Ibid. p. 167-169
17 Ibid. p. 274-275
18 Ibid. p. 275
19 Ibid. p.276
20 Ibid. p.281-282
21 Ibid. p.277
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