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Position de l'Assemblée des évêques du Québec sur le français |
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Assemblée des évêques du Québec |
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Texte |
Un Québec français
1. L’Assemblée des évêques du Québec a toujours été présente dans les grands enjeux de la société québécoise. Dans le débat en cours, c’est en solidarité avec le peuple québécois qu’elle apporte sa réflexion sur la situation et l’avenir de la langue française au Québec.
1.1 Pendant longtemps, au Québec et au Canada, les répartitions linguistique et religieuse étaient à ce point liées que l’Église catholique a été la gardienne de la langue française. Elle a joué un rôle de premier plan auprès de la communauté francophone. Elle s’est engagée dans les grands domaines d’activité: éducation, santé, services sociaux, ainsi que dans les secteurs de l’économie, des mouvements coopératifs et de l’action syndicale. De la même manière, elle a été présente auprès de la communauté anglophone.
1.2 Les profondes transformations qu’a vécues le Québec des quarante dernières années ont entraîné la prise en charge par l’État québécois des institutions sociales qui avaient été longtemps l’apanage de l’Église. Bien que son action soit devenue plus discrète, l’Église catholique du Québec continue de s’engager auprès de la population québécoise sous de multiples formes. Elle se sent partie prenante de la société civile devenue laïque, multiethnique, multiconfessionnelle et pluraliste.
2. L’Assemblée des évêques du Québec fait siens les grands principes qui ont présidé à l’établissement de la loi 101 et dont fait état le préambule de la Charte : «Langue distinctive d'un peuple majoritairement francophone, la langue française permet au peuple québécois d'exprimer son identité».
2.1 Le gouvernement du Québec fait face à un enjeu important : conserver le fait français qui caractérise majoritairement l’identité et la culture des Québécoises et des Québécois. En même temps, il doit respecter les citoyennes et les citoyens des communautés anglophones, allophones et autochtones qui sont également des Québécois à part entière, favorisant ainsi leur développement intégral au sein de notre société.
2.2 Depuis plusieurs années, nous assistons à l’arrivée massive au Québec de ressortissants de nombreux pays. Les Québécois sont invités à accueillir les immigrants et les réfugiés qui s’installent au Québec et à les aider à s’intégrer harmonieusement dans leur terre d’adoption. Face à cette mobilité humaine, nous ne pouvons plus de nos jours définir le peuple québécois en considérant uniquement les Québécois de souche; deviennent Québécois de plein droit tous ceux qui vivent ici.
2.3 L’évolution multiculturelle et multiethnique chez nous doit donc être accueillie et appréciée à sa juste valeur. En dépit de lectures historiques ou sociologiques divergentes, on ne peut oublier l’existence d’une société de culture française dont le Québec a été et demeure le foyer principal en Amérique du Nord. En conséquence, la qualité et le rayonnement de la langue française doivent être maintenus et sauvegardés.
3. L’Assemblée des évêques du Québec reconnaît que la Charte de la langue française a transformé à bien des égards le paysage sociolinguistique du Québec.
3.1 La Charte a en effet indéniablement solidifié le Québec français. Par exemple, le solde des transferts linguistiques qui n’était que de 3,6% en 1971 est passé à 38,7% en 1996. Les pourcentages des élèves allophones qui fréquentent l’école française a fait un bond entre les années 1976-1977 et 1997-1998, passant de 20 à 80%. Le monde du travail s’est lui aussi francisé. Le pourcentage de la main d’oeuvre qui travaille à 90% et plus de son temps en français s’est accru, entre 1971 et 1989, de 64 à 73%.
3.2 Il est bon de rappeler que ce progrès du français a été réalisé dans le respect des autres communautés culturelles québécoises.
3.3 La minorité anglophone a conservé ses institutions d’enseignement, de santé, de services sociaux et de communication. Soutenue par le contexte nord-américain, elle bénéficie d’une vitalité qui se répercute dans l’attrait que la langue et la culture anglaises suscitent toujours au sein de la société québécoise. Ce dynamisme se traduit par un gain de 2 points entre la population de langue maternelle anglaise (8,8%) et la population de la langue d’usage (10,8%), soit une progression de 23%, selon le Recensement de 1996.
3.4 Les communautés autochtones et inuit, elles aussi, font preuve d’une vitalité qui se traduit par une redécouverte de leur langue et de leur culture. En leur reconnaissant le droit à l’enseignement dans leur langue, le gouvernement du Québec a fait oeuvre de pionnier. Alors qu’un peu partout dans le monde on s’inquiète de la disparition progressive des langues, tout spécialement des langues autochtones, au Québec, elles renaissent. Le gouvernement du Québec doit être encouragé à poursuivre dans la même veine.
3.5 Lorsqu’il décide de s’intégrer, l’immigrant doit choisir entre deux langues et deux cultures d’inégale force. La société francophone a avantage à se faire accueillante, tolérante et ouverte. Comme le souligne le rapport Renaud Ils sont maintenant d’ici, la société québécoise a su répondre à cette exigence. Qui vient au Québec a tendance plus qu’autrefois à s’y établir à demeure.
4. La promotion du français dans tous les secteurs de la société a été effectuée dans le respect des autres communautés culturelles québécoises. Malgré que la Charte de la langue française ait connu des avancées significatives depuis sa promulgation, il y a plus de vingt ans, la situation linguistique reste préoccupante.
4.1 L’Église s’inscrit dans le tissu social et culturel du Québec contemporain. Elle est consciente des défis que la société devra relever dans l’avenir pour la sauvegarde de la langue française, à cause de la montée du multiculturalisme, du contexte de la mondialisation et des nouvelles techniques de communication.
4.2 En effet, la mondialisation et les nouvelles techniques de communication suscitent une réflexion par rapport au maintien de la langue française. Objectivement, la mondialisation facilite les échanges politiques, les transactions économiques et les diverses relations pratiques qui y sont associées. L’usage d’une langue principale devient essentiel dans les rapports internationaux. Le danger qui guette un certain nombre de pays, c’est celui de la globalisation comprise comme une idéologie qui favoriserait l’uniformisation. Le Québec peut subir l’influence d’une langue dominante, la langue anglaise en l’occurrence, qui imperceptiblement pourrait devenir la langue courante des générations montantes au Québec.
4.3 L’Assemblée des évêques du Québec reconnaît la légitimité pour le Québec de vouloir faire du français la langue de l’État. Elle reconnaît aussi la légitimité pour la minorité anglophone du Québec d’assurer sa vitalité. Pour permettre aux deux communautés de vivre en harmonie, nous suggérons d’établir des balises qui permettraient d’évaluer l’atteinte de l’objectif formulé dans la Charte de la langue française: «faire du français la langue de l'État et de la Loi aussi bien que la langue normale et habituelle du travail, de l'enseignement, des communications, du commerce et des affaires».
4.4 Pour conserver la langue française au Québec, nous aimerions souligner l’importance de promouvoir la qualité de la langue parlée et écrite dans le réseau scolaire et dans les médias en particulier.
4.5 L’État n’est pas le seul à porter la responsabilité de la langue. Les individus, les entreprises et les institutions ont un rôle à jouer : on ne conservera pas la langue si les citoyennes et les citoyens n’en sont pas fiers et ne font pas l’effort nécessaire pour la conserver dans toute sa beauté. Le gouvernement aurait un devoir de soutien en cette matière.
5. Il importe de rappeler l’esprit dans lequel la Commission doit planifier l’aménagement linguistique du Québec. Notre engagement pastoral nous conduit à rappeler les valeurs qui doivent guider la société : le respect et le dialogue, la recherche rigoureuse de la vérité et de la justice, l’accueil de nos différences, l’attention aux plus faibles de notre société.
6. La Commission des États généraux sur la situation et l’avenir de la langue française au Québec a pour mandat de présenter des recommandations qui vont inspirer l’action du gouvernement du Québec pour les années à venir. Les évêques ont à coeur l’épanouissement intégral de toute personne qui vit au Québec. Ils seront solidaires des gens d’ici pour que leurs droits fondamentaux en matière linguistique soient toujours respectés.
† Pierre Morissette
Évêque de Baie-Comeau et Président de l’Assemblée des évêques du Québec
Le 28 février 2001
Source en ligne : Mouvement estrien pour le français |
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Déclaration |
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