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Le français, langue des Caraïbes?
Dévasté par un terrible tremblement de terre en janvier 2010, ce pays peuplé des Caraïbes se relève peu à peu. Haïti a participé à la fondation des institutions de la francophonie dès la création de l'ACCT en 1969. Aujourd'hui, travaillant à sa reconstruction, Haïti entend jouer un rôle plus décisif dans la région des Caraïbes. Ainsi, son nouveau président, Michel Martelly, a demandé aux dirigeants des pays et territoires membres de la CARICOM réunis à Sainte-Lucie le 4 juillet 2012 d'adopter le français comme l'une des langues officielles de l'organisation. Créée en 1973, la CARICOM est une organisation régionale qui regroupe une quinzaine de pays et territoires des Caraïbes. L'anglais en est l'unique langue officielle, bien qu'avec ses 9 millions d'habitants, Haïti représente environ 56% de la population totale de la CARICOM. Les départements français de la Guadeloupe et de la Martinique ne sont pas membres de la CARICOM.

Extraits de livres
Les enjeux de la mondialisation culturelle

Jean Tardif
Hors Commerce



[Le présent document fait suite à une proposition faite récemment par M. Dufresne pour permettre la collaboration en ligne à l'Encyclopédie sur l'inaptitude.

Dossier
Décolonisation
DéfinitionAperçusDocumentation

Titulaire : Jacques Dufresne



Définition
(Dossier en révision)

L’histoire de la décolonisation et celle de la Francophonie sont inextricablement liées l’une à l’autre. On a dit que le général de Gaulle avait fait preuve de la plus grande réserve dans son adhésion à la Francophonie parce qu’il voulait éviter de donner l’impression que la France avait trouvé ce subterfuge pour recréer l’empire au moment précis où il achevait de se dissoudre. Il n’en reste pas moins que la participation des coloniaux et des anciens coloniaux, du Canada notamment, à l’effort de guerre de la France libre, entre 1939 et 1945, constitue un témoignage de solidarité qui donne à la Francophonie ses assises les plus solides. On ne peut en douter après avoir lu l’article de Robert Delavignette, dans le numéro de novembre 1962 de la revue Esprit.

«A eu la gloire d’entrer le premier dans Paris, la nuit
24 août 1944, poussant ses chars jusqu’à la Préfecture
de Police où les patriotes étaient cernés par les forces
allemandes, et ouvrant ainsi la voie aux unités qui ont
libéré la capitale le lendemain...

Quel symbole de l’Empire dans notre libération, que cette citation décernée au capitaine Dronne, du régiment de marche du Tchad, administrateur colonial au Cameroun dans le civil. Avec cet homme de l’Afrique Française, c’était l’Empire qui surgissait en cette nuit solennelle de l’Histoire de France et qui avait la gloire d’entrer le premier dans Paris patriotiquement insurgé.

Dès le 18 juin 1940, la pensée de l’Empire est liée chez général de Gaulle à la foi dans la France, et c’est une pensée polititique neuve et hardie. C’est elle qui, tout autant que la juste appréciation de l’énergie britannique et des futures forces russes et américaines, anime le chef français quand il refuse de capituler.

Et le 25 août 1940, une colonie du centre africain, le Tchad, conduite par un noir, le gouverneur Eboué, rallie de Gaulle et déclenche la Résistance outre-mer qui gagnera toute Afrique Equatoriale, qui se communiquera en Océanie et aux Indes, et qui éclatera en Afrique du Nord en Novembre 1942 à l’occcasion du débarquement des Alliés. Cette Résistance africaine donne lieu à d’extraordinaires exploits sahariens, de nature à exalter la Résistance métropolitaine.

Qui traverse le Sahara pour vaincre l’Axe au Fezzan ? Qui est Bir-Hakeim ? Qui précipite la libération de 1’Algérie et force la victoireen Tunisie ? Qui entre à Rome ? Qui est aux côtés des anglo-Aménicains au Cotentin et en Provence ? Qui est à la pointe du combat pour délivrer Paris et puis Strasbourg ? Des coloniaux, toujours des coloniaux. Et par coloniaux, nous entendons non seulement les Européens mais aussi les Indigènes. Ils sont ensemble ; on ne peut les séparer.

Et ce sont essentiellement des Africains : tirailleurs d’Afrique noire ou d’Afrique du Nord, zouaves, spahis algériens, goumiers marocains. C’est une armée grossie par les Français évadés de la métropole mais levée de l’Afrique même. Elle a un armement disparate et d’emprunt, mais une séculaire tradition africaine. A force de sacrifices, elle impose la présence de la France en armes dans les Nations-Unies.

Pour l’historien qui cherche objectivement les faits, la France combattante libre de 1940 à 1944, celle qui va donner la main en 1944 aux maquisards et aux résistants de l’intérieur, c’est Charles de Gaulle, ensemble avec les colons d’Afrique du Nord et avec MamadouCoulibaly et Sidi Mohammed Lakdar.


La France combattante libre, c’est avant tout une armée sa gloire militaire, qui va jusqu’à l’épopée, serait superficiellement comprise si nous n’apercevions pas derrière elle la montée d’un monde nouveau. »


L'auteur de cet article, Robert Delavignette, était, en 1962, directeur de l'École coloniale. Abdou Diouf, qui venait de terminer ses études dans cette vénérable institution, lui rend hommage dans l'entretien qu'il a accordé à Philippe Sainteny, sur RFI en 2003.

Le monde nouveau annoncé par Robert Delavignette c'est celui d'une solidarité entre nations libres. La suite de son article est une excellente initiation à l'histoire de la colonisation en France et à celle des critiques dont elle a été l'objet.

Ces critiques, Senghor et ses amis en avaient sans doute déjà pris connaissance au cours de la décennie 1930. Cela aide à comprendre pourquoi ils ont accordé leur pardon à la France et pourquoi ils sont souhaité maintenir de bonnes relations avec elle. Ils avaient d'excellentes raisons de se sentir déjà compris des intellectuels les plus éclairés et les mieux inspirés du moment.

Parmi ces intellectuels, il y eut Jean-Paul Sartre. Nous faisons état de sa contribution au débat sur la décolononisation dans notre document intitulé: Senghor: le poète.

Avant lui, Simone Weil avait situé la question à son plus haut degré moral. Senghor l'a-t-il lue à ce moment, l'a-t-il rencontrée? Il a sûrement été sensible à un esprit critique à l'endroit de la colonisation déjà assez répandu. D'où l'intérêt de reproduire ici quelques pages de Simone Weil écrites vers la fin de la décennie 1938, des pages qui éclairent d'une façon singulière les origines lointaines de la Francophonie. Certes Simone Weil dénonce l'injustice associée à la colonisation, mais elle aborde aussi la question de façon pragmatique. Elle démontre que la seule façon pour la France de conserver sa puissance et son rayonnement c'est de maintenir des liens avec d'anciennes colonies qui décideraient librement de lier leur destin au sien.

Après avoir examiné deux hypothèses pouvant conduire à la libération des pays colonisés, une opinion publique favorable à la chose en France ou une révolte armée dans les colonies et conclu qu'elles étaient toutes deux irréalistes, elle examine une troisième possibilité:

«Il semble qu'il n'y ait pas d'issue, et pourtant il y en a une. Il existe une troisième possibilité. C'est que la nation colonisatrice ait intérêt elle-même à émanciper progressivement ses propres colonies, et qu'elle comprenne cet intérêt. Or, les conditions d'une telle solution existent. Le jeu des forces internationales fait que la France a intérêt, un intérêt urgent, évident, à transformer ses sujets en collaborateurs. Il faut qu'elle comprenne cet intérêt; ici, la propagande peut s'employer.

Pour qui regarde seulement l'Europe, il est regrettable à bien des égards que la paix n'ait pu se maintenir qu'au prix des concessions de Munich. C'est affreux pour ceux des Allemands des Sudètes que ne séduit pas le régime hitlérien; c'est fort douloureux pour la Tchécoslovaquie, qui n'a plus qu'une ombre d'indépendance nationale; c'est amer pour les États démocratiques, dont le prestige et par suite la sécurité apparaissent amoindris. Mais si on regarde l'Asie et l'Afrique, les accords de Munich ouvrent des espérances jusque-là chimériques. La France, dont la position en Europe a subi une si grave atteinte, ne se maintient au rang des grandes puissances que par son Empire. Mais ce qui lui reste de force et de prestige ne peut plus lui suffire à conserver cet Empire si ceux qui le composent ne désirent pas eux-mêmes y demeurer.

Les revendications de l'Allemagne concernant ses anciennes colonies ne touchent qu'un aspect partiel et secondaire de ce problème. Nul ne sait quand elle posera officiellement ces revendications, ni quelles revendications plus étendues pourront suivre. Mais dès aujourd'hui l'Empire français est l'objet des convoitises de l'Allemagne et de ses alliés. L'Allemagne a toujours considéré comme abusif — non sans motifs — le protectorat français sur le Maroc; l'Italie a depuis longtemps les yeux sur la Tunisie; le Japon désire l'Indochine. La France ne possède pas la puissance nécessaire pour défendre de si vastes territoires si les populations intéressées lui sont dans le for intérieur hostiles, ou même si elles assistent au conflit d'ambitions en simples spectatrices.

Certaine fable de La Fontaine sur l'Âne et son maître est utile à relire en l'occurrence. Tout le monde en France la connaît; il n'est que de songer à l'appliquer. Quand même tous les Français des colonies adopteraient soudain les procédés les plus humains, les plus bienveillants, les plus désintéressés, cela ne suffirait pas à susciter dans l'Empire les sentiments nécessaires à la sécurité de la France. Il est indispensable que les sujets de la France aient quelque chose à eux qu'une autre domination risquerait de leur faire perdre; et à cet effet il est indispensable qu'ils cessent d'être des sujets, autrement dit des êtres passifs, bien ou mal traités, mais entièrement soumis au traitement qu'on leur accorde. Il faut qu'ils entrent effectivement, et bientôt, et assez rapidement, dans le chemin qui mène de la situation de sujet à celle de citoyen.

Il n'est pas question de faire des colonies, tout d'un coup, des États indépendants. Une telle métamorphose serait sans doute sans lendemain; mais de toute façon, aucun gouvernement français, de quelque parti qu'il se réclame, n'y songerait. Il y aurait à examiner des modalités d'autonomie administrative, de collaboration au pouvoir politique et militaire, de défense économique. Ces modalités différeraient nécessairement selon les colonies. Les mêmes solutions ne sont pas applicables sans doute aux Annamites, qui n'ont pas attendu l'invasion française pour être un peuple hautement civilisé, et à tels territoires du centre de l'Afrique. Le passé, les mœurs, les croyances doivent entrer en ligne de compte. Mais quelles que soient les modalités, le succès n'est possible que si elles s'inspirent de la même nécessité urgente: les populations des colonies doivent participer activement et en vue de leur propre intérêt à la vie politique et économique de leurs pays.

En ce qui concerne la France, il n'est pas sûr qu'une telle politique, même rapidement et intelligemment appliquée, puisse être efficace. Il est peut-être trop tard. S'il est vrai, par exemple, que sur les millions d'habitants du Nord Annam et du Tonkin neuf familles sur dix environ avaient perdu au moins un de leurs membres à cause de la répression de 1931, ces millions d'hommes ne pardonneront peut-être pas facilement. Mais ce qui est à peu près certain, c'est que cette politique offre à la France l'unique chance de conserver son rang de grande puissance que presque tous les hommes politiques jugent indispensable à sa sécurité.

En revanche, en ce qui concerne les colonies, une telle politique, si elle est effectivement suivie, sera efficace dans tous les cas. Soit que les populations colonisées, à la suite d'une émancipation partielle, forment ou non des sentiments favorables au maintien de l'Empire français; soit qu'elles demeurent, dans l'avenir prochain, sous la domination française ou passent sous une autre domination dans tous les cas, les libertés acquises leur donneront des possibilités de se défendre contre n'importe quelle oppression et des possibilités d'aller vers une émancipation complète qu'elles ne possèdent pas actuellement. Elles sont présentement désarmées et à la merci de quiconque demeure parmi elles avec des armes. Il n'y a aucun doute, par exemple, que si le Japon s'emparait présentement de l'Indochine, il profiterait de l'état d'impuissance et de passivité où il trouverait les Annamites. S'il les trouvait en possession de certaines libertés, il lui serait difficile de ne pas au moins les maintenir. Ainsi du point de vue français, une telle politique est nécessaire; du point de vue humain — qui, soit dit en passant, est naturellement le mien — quelles que puissent en être les conséquences pour la France, elle serait heureuse.

Ceux qui sont habitués à tout considérer sous la double catégorie «révolutionnaire» et «réformiste» — la première épithète, dans ce système manichéen, désignant le bien et la seconde le mal — trouveront sans doute qu'une telle solution du problème colonial est atteinte de la tare indélébile du réformisme. Pour moi, sans hésitation, je la juge infiniment préférable, si elle se réalise, à une émancipation qui résulterait d'un soulèvement victorieux. Car elle permettrait aux populations soumises aujourd'hui à tant d'intolérables contraintes d'accéder au moins à une liberté partielle sans être forcées de tomber dans un nationalisme forcené — à son tour impérialiste et conquérant -, dans une industrialisation à outrance fondée sur la misère indéfiniment prolongée des masses populaires, dans un militarisme aigu, dans une étatisation de toute la vie sociale analogue à celle des pays totalitaires. Telles seraient presque infailliblement les suites d'un soulèvement victorieux; quant aux suites d'un soulèvement non victorieux, elles seraient trop atroces pour qu'on ait envie de les évoquer. L'autre voie, moins glorieuse sans doute, ne coûterait pas de sang; et comme disait Lawrence d'Arabie, ceux qui ont pour objet la liberté désirent vivre pour en jouir plutôt que mourir pour elle.

Ce qui risque d'empêcher qu'une solution si désirable au problème colonial devienne une réalité, c'est l'ignorance où on est en France des données du problème. On ignore que la France n'est pas, aux yeux de la plupart de ses sujets, la nation démocratique, juste et généreuse qu'elle est aux yeux de tant de Français moyens et autres. On ignore que les Annamites, notamment, n'ont aucune raison de la préférer au Japon, et en fait, à ce qu'on entend dire de plusieurs côtés, ne la préfèrent pas. Ici le rôle des informations peut être très important. Tant que les informations concernant le régime colonial ne mettaient en cause que la générosité de la France, elles risquaient de tomber dans l'indifférence et surtout dans l'incrédulité générale. C'est effectivement ce qui s'est produit. Dès lors qu'il est question de sécurité, elles ont chance d'être prises plus au sérieux. Si pénible et si humiliant qu'il soit de l'admettre, l'opinion d'un pays, sans aucune distinction de classes sociales, est beaucoup plus sensible à ce qui menace sa sécurité qu'à ce qui offense la justice.»1

1. Weil, Simone, Écrits historiques et politiques, Gallimard, Paris 1960, p.353-356.







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