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Questions vives
Fin des méchants capitalistes et des bons travailleurs?
Pour ce qui est de la culture de transition, voici un avis partiel.  Cette transition devra pour réussir rompre avec la traditionelle rhétorique des méchants capitalistes et des bons travailleurs.  Pour aller vers une société qui ne soit plus sous le seul joug de la loi du profit des seuls actionnaires, il nous faut apprendre à articuler son organisation aussi autour d'une reconnaissance des droits et responsabilités ainsi que d'un pouvoir réel des véritables producteurs des biens et services. Les quatre axes choisis - l'argent comme outil indispensable à la circulation de l'information financière, la responsabilité sociale et collective de nourrir l'humanité, la destruction de notre habitacle planétaire, une diversification énergétique équilibrée - sont effectivement à ce point inter reliés qu'il est à mon avis suicidaire d'imaginer pouvoir les dissocier dans la recherche des solutions. La connaissance et l'éducation pour tous, sans lesquelles les techno-sciences ne pourront pas être mises au service du bien commun, doivent être cultivées dans un climat où respire une conception responsable de la liberté. Le socialisme démocratique que je prône n'a rigoureusement rien à voir avec les régimes totalitaires soviétiques ou chinois. Ces régimes n'ont été que des capitalismes d'État, beaucoup moins performant que le capitalisme privé; et on a vu comment a été facile et rapide leur passage dans le rang du plus fort. Le temps est venu de relire Le Capital avec un regard éclairé. Voir l'article du philosophe Lucien Sève, 'Marx contre-attaque', dans Le Monde diplomatique, décembre 2008, 3. Une culture de transition, développée dans une réelle valorisation de nos divergences, est une voie qui s'impose. ...

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La langue française dans le monde au tournant du XXe siècle

Ferdinand Brunot
Présentation
Situation du français dans le monde, à l'époque où Onésime Reclus forge le mot «francophonie», par un grand historien de notre langue. Si le français est encore, en bien des contrées, la langue de la culture, déjà, on peut le voir, l'anglais étend ses tentacules, notamment pour ce qui est du commerce.

Texte
A l'extérieur

Le moment n'est pas venu d'établir le bilan de ce siècle. Pour l'histoire externe de la langue, les documents font à peu près complètement défaut. Il est certain que le français a perdu sa suprématie, et qu'un livre comme celui d'Allou sur l'Université de la langue, déjà un peu en retard à l'époque où il parut, serait aujourd'hui tout à fait ridicule. Toutes sortes de causes politiques, nos revers, le réveil universel de l'esprit national chez les divers peuples d'Europe ont rendu impossible le maintien de la situation privilégiée que notre idiome s'était créée au XVIIIe siècle. S'il la garde dans la diplomatie, c'est un peu comme le sultan garde Constantinople, parce que sa succession ouverte ferait naître trop de compétitions. Mais il n'est plus la langue qu'un homme cultivé est obligé de savoir, en même temps que la sienne.

Ce n'est pas à dire qu'on ne l'apprenne plus. L'admirable renaissance de notre littérature, l'éclat de notre vie scientifique, intellectuelle, artistique, la hardiesse de notre évolution politique empêchent qu'on cesse de tourner les yeux vers Paris, et d'y suivre le mouvement des esprits. De Madrid à Pétersbourg on a continué à considérer la possession de notre langue comme une élégance, un charme et un avantage. Peut-être même peut-on affirmer qu'il n'est pas une langue étrangère aussi généralement étudiée : en haut par des raffinés et des savants, en bas par des révoltés. Il y a là plus qu'une tradition, plus même qu'un hommage de reconnaissance pour le rôle glorieux joué par notre langue dans l'histoire du monde. C'est chez les uns un goût sincère, chez les autres une volonté de rester en relations avec le peuple qui a semé dans le monde des idées et des espérances dont la moisson pousse toujours.

Mais le monde moderne est aussi un monde d'affaires, dont l'utilité, autant que le goût, détermine les mouvements. Or la marche des choses a fait que le français n'est plus la langue qu'il est le plus utile de savoir. Le nombre peu considérable de nos émigrants, la décadence de notre marine de commerce, la timidité de nos exportateurs ont fait que peu à peu la langue la plus générale des affaires est devenue l'anglais, qui a pris possession d'une partie du nouveau monde, et qu'on commence à comprendre un peu dans tous les ports. L'allemand se fait aussi sa large part, souvent aux dépens de la nôtre. L'italien a gagné dans la Méditerranée, ainsi de suite.

On ne saurait donner à cet égard de chiffres précis. Toutefois l'Alliance française doit publier à l'occasion de l'Exposition de 1900 un aperçu de l'état de notre langue dans les divers pays qui fournira au moins quelques données.

Dans les pays de protectorat et les colonies, qui comprennent de neuf à dix millions de kilomètres carrés et de 30 à 40 millions d'habitants, nous eussions dû trouver quelques compensations aux échecs subis ailleurs. L'incurie des gouvernements en a décidé autrement. Sauf dans les anciennes colonies Saint-Pierre et Miquelon (6 000 habitants), la Guadeloupe (167 000), la Martinique (190 000), la Réunion (168 000), où du reste le français s'est transformé dans la bouche de mulâtres en un patois créole, les fonctionnaires, marins, militaires, sont à peu près seuls avec quelques rares colons à parler français. La masse indigène n'est vraiment entamée nulle part. Même en Algérie pacifiée depuis cinquante ans, le nombre des enfants qui connaissent notre langue est dérisoire. Les statistiques ne sont pas fournies - on n'oserait point - mais nous savons par ailleurs où en est la question. On la discute encore théoriquement, et la majorité des colons est hostile à une diffusion de l'enseignement, qui, en relevant le niveau moral et intellectuel des Arabes et Kabyles, aboutirait à relever leur condition. L'administration métropolitaine, oublieuse de ses devoirs moraux comme de ses intérêts, s'abstient, s'abandonnant à l'initiative de gouverneurs plus préoccupés de résoudre les petites questions du moment que de préparer un grand avenir. On compte seulement soit en Algérie, soit en Tunisie, 322 000 personnes d'origine française, armée non comprise.

Au contraire, dans plusieurs de nos anciennes colonies la situation de notre langue continue à être satisfaisante. Si elle recule à la Louisiane, où cependant on compte encore à peu près 80 000 personnes de langue française, au Canada elle a gagné par le fait même de l'accroissement du chiffre de la population d'origine française. M. Rameau de Saint-Père, rectifiant le recensement officiel, comptait, en 1893, 1 473 322 Canadiens français (sauf la Colombie britannique). A Haïti, et dans les Antilles, si on compte comme Français les gens parlant créole, le chiffre est d'environ 1 000 000. La population de la Dominique et de Sainte-Lucie est restée aussi en grande majorité attachée au français. A ajouter pour Maurice et les Seychelles 350 000 environ.

C'est encore un grand événement pour notre langue que la fondation de cette oeuvre privée, issue de l'initiative de M. P. Foncin, qui s'appelle l'Alliance française pour la propagation de la langue française dans les colonies et à l'étranger, et qui depuis vingt ans a fondé, soutenu ou ressuscité des centaines d'écoles qui sur tous les points du globe entretiennent le culte et la connaissance de notre idiome.

Limites actuelles de la langue française en Europe

Il est à peu près impossible d'évaluer exactement le nombre des habitants de l'Europe occidentale dont le français ou les patois français sont la langue maternelle.

D'abord, comme tout le monde sait, le français n'est pas la langue de tous les habitants de notre territoire, dont environ 2 000 000 (en y comprenant la Corse) parlent diverses langues ou patois étrangers, d'origine germanique, celtique ou italienne.

En revanche on compte en dehors de nos frontières environ 3 900 000 personnes de langue française : en Belgique 2 877 000 (1), dans le pays de Malmédy (Prusse rhénane) 9000; en Alsace-Lorraine 217 500 (évaluation de 1888, où on compte pour moitié ceux qui parlent allemand et français); en Suisse 643 600. Les Français des vallées alpines n'ont pas été comptés à part depuis 1866; ils étaient alors 121747 dans l'arrondissement de Turin, chiffre trop fort aujourd'hui. Il faut ajouter la population des îles anglo-normandes, qui parle un patois normand. De sorte que le groupe compact de population de langue française en Europe peut être évalué à 40 millions en chiffres ronds.


1. Pour obtenir ce chiffre, on ajoute, suivant un usage reçu, à la population de langue exclusivement française la moitié de celle qui parle flamand et wallon ou allemand et wallon, et le tiers de celle qui parle les trois langues.

Source
Ferdinand Brunot, chapitre XIII : «La langue française au XIXe siècle», de Louis Petit de Julleville (dir), Histoire de la langue et de la littérature française des origines à 1900. Tome VIII. Dix-neuvième siècle : période contemporaine (1850-1900), Paris, Librairie Armand Colin, 1896, p 861-864.
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