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«Ainsi, l'instauration d'un système d'évaluation alternatif au « Citation index », européen, voire partagé avec les russes, pourrait, s'il était reconnu par les Etats-Unis, constituer un puissant vecteur d'incitation à la publication des travaux dans une autre langue que l'anglais.»

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Les années d'apprentissage

Stéphane Stapinsky
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Dans ses souvenirs, publiés en 2000, Jean-Marc Léger évoque avec beaucoup de verve son enfance dans un famille de condition modeste, à cheval entre la ville et la campagne. Cette famille était représentative de bien des familles canadiennes-françaises du début du XXe siècle :

«Les deux familles, paternelle et maternelle, avaient en commun des traits hérités d'une longue lignée paysanne : le primat du labeur, d’autant plus acharné que la terre ne rendait pas toujours ce qu’on en attendait (...), l’inclination naturelle au partage et à l’entraide, un sens exigeant de l’équité, une singulière énergie, morale autant que physique – commune alors chez les nôtres – le sens et le goût de la fête, avec la participation de chacun. On y avait en horreur deux défauts en particulier : le mensonge et la paresse. Tels étaient la vigueur morale, le dynamisme et l’esprit de solidarité chez nos anciens qu’on y supportait les épreuves mieux que nous ne savons faire, qu’on faisait face avec un courage obstiné à la pénurie et aux multiples difficultés de l’existence quotidienne, sans bénéficier pourtant d’aucune des mesures d’assistance et de protection sociale que nous connaissons. Nos contemporains (et cela se vérifie dans la plus grande partie du monde occidental) bien que disposant de ces multiples recours, de ces filets de sécurité, acceptent plus malaisément et supportent plus difficilement les revers de fortune, les effets d’une récession, la baisse du niveau de vie, les épreuves diverses que leurs devanciers.» (Le temps dissipé, p. 23)

C'est à Montréal que Jean-Marc Léger vécut son enfance et sa jeunesse avec sa famille - de 1931 à 1949, rue de Chateaubriand, puis, à partir de 1949, sur le boulevard Gouin, à Cartierville, au nord de l'île. Une village au nord de Montréal, Sainte-Scholastique, dans la région de Deux-Montagnes, allait aussi, en raison des attaches familiales et de la force d'évocation historique du lieu, bercer son enfance et son adolescence :

«Sainte-Scholastique : pour nous, frères et sœurs, ce nom seul résume toute une part de notre enfance et de notre adolescence, l’immense, pittoresque et attachante galerie des oncles et tantes, des cousins, des notables et des commerçants, des «types» du village, de force personnages colorés. Notre attachement à ce village tenait aussi à son histoire, à son rôle non négligeable dans le soulèvement de 1837 et dans la période de fièvre qui avait précédé. Avec Saint-Eustache et Saint-Benoît, Sainte-Scholastique avait été une pépinière de patriote : d’ailleurs toute la région de Deux-Montagnes avait été, au nord de Montréal, l’équivalent de la région du Richelieu, au sud. Ce furent les hauts lieux de la courageuse et pitoyable insurrection promise dès le début à l’échec. Nous avons grandi dans une atmosphère d’épopée, si modeste et quasi dérisoire eût-elle été, à l’aune de l’histoire de l’Occident.» (p. 63)

Son milieu familial l'aura aussi éveillé à la politique. Il naît et grandit à l’époque de la l’Action libérale nationale, des débuts de Maurice Duplessis, de la Deuxième Guerre mondiale. Avec, bien sûr, la «crise de la conscription». Sa famille, de tradition libérale, allait cependant modifier ses allégeances à la suite de cet événement décisif : «La jeunesse, celle des universités et des collèges surtout, s’engagea avec fougue et lyrisme dans le mouvement. Nous découvrions en même temps aussi bien l’abbé Groulx, à la fois historien et éveilleur, qu’André Laurendeau et René Chaloult : nous lisions et commentions avec passion les œuvres et les conférences du premier, les dicours, articles et interventions des deux autres. (...) Bien que le Québec eût répondu «non» à près de 80% le 27 avril 1942, Ottawa s’estima délié, par le «oui» nettement majoritaire du reste du pays, d’une promesse qu’il avait pourtant faite au seul Québec. Je compris dès ce moment que la duplicité était naturellement inscrite au cœur du fédéralisme canadien : j’eus plus tard, moult occasions, comme chacun, de vérifier qu’elle en est inséparable.» (p. 82)

C'est dans cette période trouble, à l'automne 1938, que Jean-Marc Léger, comme plusieurs jeunes doués de milieux populaires de l'époque, entrepris son cours secondaire au collège André-Grasset, alors appelé Externat de Saint-Sulpice, dirigée par les sulpiciens :

«Entreprendre des études secondaires, aller au "collège classique", c'était encore à cette époque, pour un enfant de milieu modeste, un événement considérable. Cela représentait à la fois un choix lourd de conséquences et une rupture avec l'univers jusqu'alors familier dessiné par les voisins, l'école primaire, la paroisse. Il y avait certes l'incidence financière d'une telle décision, la durée des études (huit ans, sans compter le passage à l'université) mais il y avait davantage peut-être une sorte de barrière psychologique : selon un sentiment diffus et profondément ancré, le "grand collège" comme on disait alors n'était pas fait pour les enfants des classes populaires.» (p. 91)

Il se montre très reconnaissant à l’égard des maîtres qu'il a eus : «Ils étaient en permanence à notre service, éminemment disponibles, y compris en dehors des heures de classe. C'est là par excellence la sorte de dette de gratitude qu'on ne saurait jamais acquitter.» (p. 92)

Son cours classique complété, il entreprend des études supérieures à l'Université de Montréal. Il y poursuit, en même temps (1946-1949), des études en droit, ainsi qu'en sciences sociales. Avec humour, il se décrit, à l'époque, face à toute cette besogne, comme un véritable «stakhanoviste»... (p. 117)

Il obtient sa licence en sciences sociales, en rédigeant un mémoire, sous la direction du professeur René Ristelhueber. Le thème abordé : les rapports entre pays slaves et germaniques dans l’histoire contemporaine.

Il entreprend également des études en vue de l’obtention d’une maîtrise en histoire (plus spéficiquement en « histoire nationale » québécoise). Il bénéficia de conditions favorables. « Il était alors possible à un étudiant ayant déjà fait deux années de scolarité dans une faculté comme lettres, droit ou philiosophie, de faire la maîtrise en histoire en un seule année. » (p. 119) Ce qui l’attirait alors, « c’était bien moins la perspective de la maîtrise (…) que l’occasion de suivre les cours de professeurs aussi réputés que Guy Frégault, Maurice Séguin, Michel Brunet, notamment, dont le prestige ne cesserait de grandir et atteindrait son apogée au début des années soixante. » (p. 119)

Mais durant toutes ces années, il est très sollicité par ce qu'on pourrait appeler les activités extra-curriculaires :

«Pour ma part, lorsque j’évoque les trois années passées à l’Université de Montréal, c’est moins à la Faculté de droit (et, à un moindre degré, à celle de lettres et de sciences sociales) que je pense spontanément qu’au journal des étudiants, le Quartier latin, à l’Équipe de recherches sociales, au Club des relations internationales, à Amérique française. Je confesse aisément que j’y ai consacré au total plus de temps qu’à mes études (malgré l’intérêt que j’éprouvais pour plusieurs des disciplines juridiques et pour l’histoire) et que tout bien pesé, je n’en éprouve aucun regret, estimant que ces activités extra-curriculaires ont été aussi formatrices et souvent plus enrichissantes que certains des enseignements qui m’étaient proposés.» (p. 110)

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